Les hommes et les femmes de l'Université:
deux siècles d'archives.
Journée d'étude organisée par le Centre historique des archives
nationales (CHAN).
Archives nationales, Paris.
11 au 13/03/2008
L’État et l’éducation, 1808-2008.
Colloque international organisé par l’UMR 8596 - Centre Roland Mousnier
(Université Sorbonne - Paris IV), l’UMR 8529 - IRHiS (Université Charles
de Gaulle - Lille 3) et le Service d’histoire de l’éducation (INRP - ENS). La Sorbonne, Paris.
Ledécret
du 17 mars 1808, qui
organise l’Université impériale créée par la
loi du 10
mai 1806, marque la
naissance de l’institution scolaire d’État en France. Cette
construction réglementaire fait suite aux deux premières lois
sur l’instruction publique des 3 brumaire an 4 (25 octobre 1795)
et 11 floréal an 10 (1er mai 1802), la deuxième ayant notamment
créé les lycées et l’inspection générale. Elle reprend le cadre
des anciennes universités, abolies en 1793, pour l’étendre à
l’ensemble du territoire de l’Empire. Dans ce cadre,
l’instruction publique est organisée sur le mode corporatif,
tout en étant, en fait, soumise à la tutelle de l’État.
Quoi de neuf ?
Le service des
archives de l'Université de Haute-Alsace met en ligne une troisième
version de son site internet qui demeure un important vecteur de
communication lui permettant, entre autres, de présenter ses
activités, son fonctionnement et ses réalisations.
Également conçu pour être un outil de gestion d’archives, il permet -
en intranet - la consultation de toute une série de documents
essentiels à l’UHA, à commencer par les procès-verbaux de ses
conseils. Par
ailleurs, chaque service peut y interroger le tableau de gestion de
ses documents, les bordereaux d’élimination et de versement de ses
archives, ou bien encore effectuer en ligne ses demandes de
communication. Le site internet du service des archives donne aussi à
l’ensemble de son public la possibilité d’accéder au guide de
recherche, aux répertoires numériques détaillés, aux archives
numérisés (documents, photographies et témoignages). Enfin,
il sert de support à la diffusion et à la vulgarisation du patrimoine
historique de l’UHA : une bibliographie complète, une chronologie
exhaustive, une exposition virtuelle inaugurée à l’occasion de son
trentième anniversaire ainsi que plusieurs articles et/ou ouvrages en
texte intégral y figurent.
Le domaine de
l'Illberg avant l'implantation du campus universitaire
STOSKOPF, Nicolas.
Université de Haute-Alsace. La longue histoire d'une
jeune université.
Strasbourg : La Nuée Bleue, 2005.
P.26-28.
Dès son élection,
à la suite du décès de Jean Wagner, et sa prise de fonction, le 8 octobre
1956, Émile Muller fit allusion à de grands projets qui devaient
transformer Mulhouse en "une ville modèle1".
Il est très probable que la réalisation de ce qui deviendra le campus
universitaire de l'Illberg2
était déjà envisagé à ce moment. En effet, la Ville avait repris en
juillet 1955 un projet de régularisation des bords de l'Ill et de création
d'un parc municipal des sports qui remontait à 1937. Touché par
l'expropriation d'un quart de ses terres, le gérant de la société anonyme
du domaine de l'Illberg, Pierre Schlumberger3,
offrit en novembre 1955 de céder la totalité des parts sociales, et donc
des 69 hectares du domaine, pour un prix de 172 millions de francs de
l'époque4.
Il fallut attendre un vote à huis clos du conseil municipal le 1er juillet
1957 pour officialiser la transaction5.
Quelques
mois plus tard, le 12 novembre, Émile Muller put annoncer au conseil
municipal en séance publique la création du "groupe universitaire de
l'Illberg" qui comprendrait l'ouverture d'une propédeutique scientifique,
le transfert de l'École de chimie et la construction d'une cité
universitaire. La ville offrait le terrain et inscrivait à son budget de
1958 une somme de 10 millions de francs pour permettre le démarrage rapide
des travaux. A y*un conseiller qui lui reprochait le manque de clarté de
son propos, Émile Muller répliqua avec aplomb : "Bien sûr, l'exposé n'est
pas très clair, il n'est même pas chiffré : il s'agit simplement de la
prise en considération d'un de nos projets. (...) Nous vous demandons
actuellement, sans pou autant pouvoir chiffrer, ni le montant des travaux,
ni la subvention de l'État, de vous engager à demander à l'Éducation
nationale l'implantation de toute cette cité universitaire à Mulhouse sur
un terrain que nous mettons à disposition de l'Éducation nationale".
Sur ce point,
l'action de la municipalité fut décisive, comme le reconnut Bernard
Thierry-Mieg un peu plus tard : si Gaston Berger et Pierre Donzelot,
directeur de l'équipement universitaire, scolaire et sportif au ministère
de l'Éducation nationale6,
s'était laisser convaincre d'implanter à Mulhouse un collège
universitaire, "c'est d'abord parce qu'ils ont été séduits par l'esprit
novateur d'une municipalité qui avait acquis à l'avance tous les terrains
nécessaires à l'oeuvre dont ils étaient responsables".
1 Discours
d'intronisation d'Émile Muller, séance du conseil municipal, 8.10.1956,
Archives municipales de Mulhouse (AMM).
2 Non seulement le
terme de campus n'est pas utilisé à l'époque, mais il sert de repoussoir :
ainsi aux Journées textiles d'octobre 1961, Jean Pozzi, délégué général du
ministère de la Construction, chercha à démontrer que l'Illberg se
distinguerait des campus anglo-saxons isolés de la ville dans laquelle ils
était un corps étranger et qu'il permettrait au contraire aux étudiants et
aux professeurs de s'intégrer à la vie urbaine. Cf. J. Pozzi,
"Développement et harmonisation des implantations scolaires et
universitaires dans le cadre de la ZUP de l'Illberg", Bulletin de la
Société industrielle de Mulhouse (BSIM), n°704, 3-1961, p.36.
3 Né en 1891, il était
le petit-fils de Jules-Albert Schlumberger (1804-1892) qui exploitait à
Mulhouse les usines de la Dentsche ( à l'emplacement de la tour de
l'Europe) et de la Mer Rouge.
4 Lettre du 7.11.1955,
Réquisition et cession du domaine de l'Illberg, AMM 10 Ad 22.
5 Au prix de 127,8
millions de francs qui tenait compte de l'expropriation préalable de 18
ha. Point 11 de la séance à huis clos du conseil municipal de Mulhouse,
1.7.1957, AMM 1118 W 41.
6 Pierre Donzelot
(1901-1960), né à Valentigney, docteur en sciences physiques, avait été le
prédécesseur de Gaston Berger comme directeur général de l'enseignement
supérieur de 1948 à 1953. Après une mission aux États-unis, il occupa ses
nouvelles fonctions au ministère de l'Éducation nationale à compter d'août
1956.
Le projet
d'aménagement du centre universitaire et sa maquette
STREITH,
Jacques
La
maquette géante du projet de Centre Universitaire exposée en mai 1958 au
Palais des Sports de Mulhouse.
Sous
l’impulsion du Magistrat et de la Société Industrielle de Mulhouse s’était
mis en place vers 1956 un groupe de six personnes qui avaient pour mission
de proposer des mesures concrètes en vue de la création d’un Centre
universitaire sur la colline de l’Illberg.
Un des
membres de ce groupe, l’architecte François Spoerry, ainsi que son
collègue René Rotter, avaient été chargés d’élaborer un plan d’aménagement
urbanistique, le long d’un croissant ouvert vers le nord et couvrant
quelque 150 hectares en bordure sud de la ville. Ce plan comportait une
zone d’habitation, le futur quartier des « Coteaux », un vaste complexe
sportif et un campus universitaire, ce dernier sis sur la colline de
l’Illberg au centre de cette longue « banane ». Dans un premier temps, les
deux architectes se déplacèrent à Mexico où venait d’être créé un complexe
universitaire pour trente mille étudiants, avec pour objectif de s’en
inspirer. Dans un deuxième temps, ils conçurent un plan d’ensemble qui fut
concrétisé par une maquette géante dont la partie « campus » fut
unanimement appréciée par les autorités ministérielles au cours des
Journées Scientifiques des 21 au 23 mai 1958 à Mulhouse. A quelques
détails près, ce plan d’ensemble fut approuvé par Marcel Lods,
l’architecte nommé par le Ministère.
Campus avec son mail
central, le quartier des « Coteaux » et,
entre les deux, le
futur lycée technique Louis Armand et l’IUT,
l’ensemble en
direction de l’ouest.
Vue panoramique du
campus
le long du mail
central en direction du sud-ouest
Vers la
fin du 20ème siècle, les réalisations architecturales et
urbanistiques étant achevées, force est de constater que le plan
d’urbanisme présenté en 1958 a pu être réalisé dans ses grandes lignes
conformément aux idées directrices des concepteurs de la maquette géante.
Notons en passant que le mail central - sur lequel donnent les entrées de
quelque douze institutions universitaires - et la Tour de l’Europe -
érigée au centre de la ville - se trouvent être placés sur le même axe.
Une vue panoramique, prise du deuxième étage du bâtiment qui est construit
à l’extrémité la plus haute du campus, est du plus bel effet. On y voit
successivement, le long de l’axe du mail central et en direction du
nord-est:
-les bâtiments du
campus en enfilade ;
-le complexe
sportif avec, en particulier, le stade de football municipal ;
-la Tour de
l’Europe dans l’axe du mail et, de part et d’autre, l’ensemble des
clochers du centre ville ;
-à l’horizon et par
beau temps le vieux volcan du Kaiserstuhl et la Forêt Noire.
Les
Mulhousiens, du moins ceux qui ont eu la curiosité d’admirer ce panorama,
éprouveront une légitime fierté au vu de cette réalisation au long cours,
construite sous l’énergique poussée de leurs édiles…et avec une partie de
leurs impôts.
L'implantation de
l'enseignement supérieur à Mulhouse
DONNET Jean-Baptiste et GROS Jacques-Henri
DONNET
Jean-Baptiste
GROS
Jacques-Henri
A
Mulhouse, jusqu'à la fin des années cinquante, l'enseignement supérieur se
caractérise essentiellement par la présence d'écoles professionnelles
privées. Cependant, une toute autre direction est prise à cette époque :
l'École supérieure de chimie de Mulhouse et l'École supérieure de
filature, de tissage et de bonneterie de Mulhouse sont rattachées - en
1957 et 1966 - à l'Université de Strasbourg, alors qu'un enseignement
supérieur public voit progressivement le jour.
Une
commission de l'enseignement supérieur, composée d'industriels (Henri
Zuber, Jean Dollfus, Bernard Thierry-Mieg, Jacques Henry Gros), d'homme
politique (Emile Muller) et d'enseignant (Jean-Baptiste Donnet) organise
notamment, en mai 1958, les journées scientifiques de Mulhouse consacrées
à la recherche et à l'enseignement supérieur.
Au cours
de cette rencontre, le président du Conseil supérieur de la recherche
scientifique (Henri Longchambon), le directeur général de l'enseignement
supérieur (Gaston Berger), le directeur général de l'enseignement
technique (L. Bastian), le directeur général des oeuvres universitaires
(Jean Babin) et le directeur général de l'équipement scolaire,
universitaire et sportif (Pierre Donzelot) président aux interventions et
décident - autour d'une maquette du futur ensemble universitaire,
technique et sportif de Mulhouse - de donner suite au projet.
Dès 1960,
six millions de nouveaux francs sont débloqués. L'architecte, Marcel Lods,
assisté de Messieurs Depondt et Meyer, engage alors sur les pentes de l'Illberg
les travaux de construction du Collège scientifique universitaire. Trois
années plus tard, le ministre de l'éducation nationale, Christian Fouchet,
pose la première pierre de l'École supérieure de chimie de Mulhouse.
Le
complexe universitaire se développe peu à peu : la réception du premier
bâtiment du Collège scientifique universitaire intervient en 1963 alors
que les trois amphithéâtres et le second bâtiment sont livrés l'année
suivante. Quant aux travaux de construction de l'École supérieure de
chimie de Mulhouse, du hall des sports et du restaurant universitaire, ils
s'achèvent durant l'été de l'année 1965.
La
première promotion du Collège scientifique universitaire de Mulhouse
comptait 52 étudiants, dont 19 seront définitivement admis aux examens de
fin d'année. Une quinzaine d'années plus tard, le Centre universitaire du
Haut-Rhin, l'École supérieure de chimie et l'École supérieure des
industries textiles rassemblent près de 1500 étudiants.