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Chapitre
III : la vie tumultueuse d’une
association centenaire
La création de l École Textile à
Mulhouse par la Société Industrielle
remonte à 1861. Nous venons d'en parler.
Ici nous relatons l'histoire parfois impétueuse
de l'Association depuis ses origines en
1896 et même depuis les premières
tentatives en 1868.
Si l'Association fête aujourd'hui
ses cent ans d'existence, des prémices
eurent lieu dès 1868. En effet, cette année-là,
quelques élèves des deux écoles qui
venaient de fusionner et d'entrer dans les
nouveaux locaux définitifs spécialement
construits à cet effet au quai des Pêcheurs,
décidèrent de former une Association et
élaborèrent des statuts. A cette époque,
le nombre d'élèves se montait à 40 par
promotion et l'école avait déjà formé
quelque 250 cadres pour l'industrie
textile. Mais, faute de participants assez
nombreux et enthousiastes et par suite de
la guerre franco-allemande désastreuse
suivie de l'annexion allemande de 1871,
cette initiative avorta.
Toutefois, les statuts furent
archivés.
31.
Une structure et des hommes
Les années passent. Ce n'est qu'en
1894, le 24 juin, jour de l'assassinat par
un anarchiste italien du président de la
République Française Sadi CARNOT, une étincelle
jaillit. Les étudiants étant en cours de
tissage avec le directeur Oscar WILD,
connu pour sa francophilie, à l'instar
des milieux industriels et étudiants,
apprennent ce tragique événement par la
bouche d'un condisciple italien. Le cours
est immédiatement suspendu et les étudiants
se retrouvent tous à Mulhouse où un monôme
de sympathie pour la France est organisé.
Nos textiliens essayent d'entraîner dans
leur sillage leurs camarades de l'École de
Chimie, mais sans succès, car ces
derniers comprenaient de nombreux futurs
chimistes de nationalité allemande dans
leurs rangs. Ils manifestent donc seuls,
mais la police du Kaiser veille. Le soir
nos étudiants se réunissent au Café
Luxhof de la rue du Sauvage, l'établissement
"in" de l'époque, pour arroser
l'événement et discuter de la fondation
d'une association des anciens élèves. En
effet, en 35 ans, l'école avait déjà
formé quelque 1000 cadres pour
l'industrie textile. Des statuts basés
sur ceux de 1868 sont élaborés et déposés
à la Kreisdirektion pour autorisation
d'existence juridique. Malheureusement,
cette autorisation, après enquête par
les autorités allemandes et au vu du
comportement francophile des étudiants du
textile, est refusée sans indication de
motif. Autre conséquence de leur
manifestation, à partir de cette époque,
les étudiants alsaciens n'ont plus le
droit - sous peine de refus de diplôme -
d'assister aux cours dispensés en langue
française à l'École qui enseigne ses
matières dans les deux langues, une
section française pour les Français et
les étrangers et une section allemande
pour les Alsaciens et les germanophones. Néanmoins,
les étudiants alsaciens continuent à
pratiquer la langue française et
deviennent ainsi parfaitement bilingues.
Sur les fonts baptismaux
Deux ans plus tard, fin juin 1896,
les étudiants fêtent avec leur
professeur de filature et ancien élève
Henry BRUGGEMANN (promo 1887/88) la fin
des études par un dîner dans la grande
salle de l'Hôtel de l'Europe. On décide
de tenter pour la troisième fois la création
d'une Association, on élabore des
statuts, cette fois-ci en deux langues, et
on charge le professeur BRUGGEMANN du secrétariat
provisoire. Le secrétaire envoie quelque
500 convocations aux Anciens pour assister
à une Assemblée générale constitutive
provisoire fixée au 22 décembre 1896 au
Café Luxhof. Si 75 convocations sont
retournées pour adresse incomplète, 55
anciens élèves se présentent au Luxhof
pour approuver les statuts (Annexe N° 30
et 31), y apposer leur signature
(Annexe N°
32) et procéder à l'élection du Comité
de l'Association. On choisit Gustave
DOLLFUS, fondateur de l'école et président
du Conseil d'Administration comme président
d'honneur, le directeur Oscar WILD comme
premier président d'une longue lignée
(Annexe N° 33 et
34), Jules BICKING (le 1°
élève de la 1° promotion 1861/62) comme
vice-président, Henry BRUGGEMANN comme
secrétaire-trésorier, Albert STORCK,
Paul GÉGAUFF, Auguste BREITENSTEIN et
Camille De LACROIX (vice-président du
C.A. et Chevalier de la Légion d'Honneur)
comme assesseurs. A noter que De LACROIX
et STORCK faisaient déjà partie en 1868
du Comité de la première association
avortée. On charge le secrétaire de la
demande d'autorisation auprès de la
Kreisdirektion. BRUGGEMANN, originaire de
Cologne, donc de nationalité allemande,
entretient d'excellentes relations avec le
Kreisdirektor SOMMER à Mulhouse. Il
demande encore une faveur supplémentaire
aux autorités allemandes, "rédiger
les statuts et la correspondance en langue
française avec les étrangers et les
autochtones qui ne maîtrisaient pas la
langue allemande, si le bien de
l'association l'exigeait". A
l'occasion d'une réception en l'honneur
du Dr. CHEBULIEZ, directeur (suisse) de l'École Professionnelle de l'Est à
Mulhouse, en avril 1897, SOMMER, entre la
poire et le fromage, glisse à l'oreille
de BRUGGEMANN : "Joignez au texte
allemand des statuts de votre Association
la traduction française si les intérêts
de l'Association l'exigent".
L’autorisation est accordée facilement
à BRUGGEMANN et notre Association fondée
officiellement.
Les Statuts : pérennité et
adaptation
Constituée le 30 juillet 1896,
notre "Association Libre des Anciens
Élèves de l'École de Filature et de
Tissage de Mulhouse" adopte également
son nom allemand "Freie Vereinigung
ehemaliger Schüler der Spinn und
Webschule Mülhausen" et se
singularise par le mot "libre".
Cet adjectif "libre" souligne à
mots couverts l'esprit antigermanique des
initiateurs. En effet, comme déjà signalé,
Mulhouse a envoyé à chaque élection législative
de 1873 à 1887 des députés
contestataires anti-annexion au Reichstag
à Berlin. Notre association
"libre" a aussi la particularité
de fonctionner avec des statuts rédigés
en allemand et en français, d'éditer une
"Revue de la Filature et du
Tissage" et un "Bulletin de
l'Association" dans ces deux langues.
Il faut néanmoins souligner que l'usage
de la langue française, si son
enseignement fut supprimé dès 1871 à l'école
primaire, n'était pas interdit, tout au
moins jusqu'à la guerre de 1914. Si les
discussions au Comité de notre
Association se font en français, les
rapports sont écrits en allemand. Même
si, par pur formalisme, l'article 32 de
ses statuts interdit toute discussion
politique ou religieuse, on peut
s'imaginer que ses membres ne manquent
jamais d'arrière-pensées politiques,
ainsi que le prouvent les différents
incidents relatés.
Une stabilité assurant la pérennité
de l'Association est garantie par
l'article 12 qui exige que les président,
vice-président, secrétaire-trésorier et
un membre du Comité devront habiter
Mulhouse. En effet, si cet article est
contraignant pour le choix des membres du
bureau, il a également permis de protéger
l'Association, entre 1897 et 1925 et au
cours de périodes politiquement troublées,
contre plusieurs attaques des groupes régionaux
tendant à prendre le pouvoir, à la décapiter
ou à la faire éclater.
Pour mieux asseoir la légitimité
du bureau, l'assemblée modifie en 1900
l'article 8 qui précise que dorénavant
les président, vice-président et secrétaire-trésorier
sont élus chaque année au sein du
bureau. En ce qui concerne les élections
des membres du Comité aux Assemblées générales,
on introduit en 1913 sur proposition du
groupe de Lille le vote par procuration en
limitant le nombre de pouvoirs à cinq. Le
même groupe de Lille, ayant le secrétaire-trésorier
BRUGGEMANN dans son collimateur, propose
de séparer les fonctions de secrétaire
de celles de trésorier, ce qui ne s'est
pas fait par manque de volontaires. Pour
alléger les travaux des Assemblées, on décide
également de modifier l'article 5 en
stipulant que "le Comité seul peut décider
de la réintégration d'un ancien membre démissionnaire".
Bien sûr, avec le retour dans le sein de
la mère-patrie et conformément au projet
des Anciens d'Épinal de 1915, retravaillé
par les Parisiens, "de déchirer les
statuts et d'en refaire des
nouveaux", on délibère au cours de
plusieurs réunions de Comité, des
statuts adoptés à l'A.G. de juillet 1919.
Enfin, en 1923, l'Association est inscrite
au Tribunal de Baillage de Mulhouse.
Toutefois, avec les changements du nom de
l'École, on sera encore plusieurs fois
obligé de modifier le nom de
l'Association. Les statuts de 1919
subissent encore d'autres modifications
mineures à partir de 1931 (Annexe N°
35).
Des assemblées générales
contrastées
Comme toute Association, les
Anciens se réunissent annuellement avec
un minimum de 25 membres, conformément
aux articles 22 et 23 des statuts, en A.G.,
suivie d'un banquet. Le même rituel se déroule
depuis un siècle avec une précision
horlogère : accueil par le président,
rapport d'activités par le secrétaire,
rapport financier par le trésorier,
quitus au Comité, questions diverses, etc…
Quant à la date, on précise en 1896
"le dernier samedi du mois de
mai", mais en 1901 on recule la date
à fin juillet pour la mettre en
concordance avec la fin des études. On
connaît ainsi les résultats scolaires.
Si le nombre de participants a toujours dépassé
le minimum exigé, il varie entre 35 en
1902 et un maximum de 170 en 1920, période
de remise en cause difficile.
Le choix de la salle pour organiser
une A.G. d'une centaine de personnes n'est
pas aisé à Mulhouse. L'Assemblée générale
constitutive a lieu le 22 décembre 1896
dans la salle de l'étage du Luxhof. Avant
la Première Guerre Mondiale le choix se
porte souvent sur l'Hôtel Central ou l'Hôtel
de l'Europe, le banquet ayant lieu dans le
même établissement. En 1904 on choisit
le nouveau restaurant du Zoo tout récemment
inauguré. Ce local a bien sûr l'inconvénient
de l'éloignement, car on ne dispose pas
assez de calèches pour monter la côte.
Il faut attendre 1908 pour pouvoir y
monter en trolley appelé le "sans
rails", "Gleislose" que les
Mulhousiens connus pour leur "parler
vrai" désignent par "dr.
Geischtlose" parce que ce trolley déraille
facilement. De nombreux Anciens, toujours
aussi indisciplinés hors profession, en
profitent pour flâner dans le beau parc
du zoo ou lors de la belle montée pédestre
avant de se rendre à l'A.G. Mais à la
suite de l'incident avec la musique
militaire allemande, on abandonne jusqu'en
1919 ce local pour revenir en ville. En
1905 le président BICKING, ingénieur en
chef à la S.A.C.M. met à la disposition
de l'A.G. la grande salle de la Société
Ouvrière de la S.A.C.M.. De 1920 à 1939,
on se réunit à tour de rôle à la Salle
de la Bourse, au Salon d'or du Casino du
faubourg de Colmar ou au Salon Vert du Café
MOLL. L’A.G. du retour à la paix en
1946 est aussi un retour aux sources, car
elle se tient à l'École où l'on inaugure
également la plaque commémorative des
Morts pour la Patrie. Les autres se
tiennent, selon le cas, à la Chambre des Métiers,
à la S.I.M., au Zoo, au Moll. Mais, à
partir de 1952, on revient à ses premiers
amours, l'amphithéâtre de l'École où
l'A.G. se tiendra pratiquement toujours.
Si les Assemblées générales
rythment la vie de l'Association, elles
sont marquées par les événements extérieurs,
sociaux, politiques, économiques et les
circonstances internes, création,
croissance, crises, commémorations, etc…
En dehors des périodes de paisible
ronronnement, les temps de rupture
tumultueux marquent toujours l'A.G. Nous
avons eu l'occasion de le souligner à
plusieurs reprises.

Comité et membres, actifs,
honoraires et d'honneur
L’article 7 des statuts de 1896
précise que l'Association est administrée
par un Comité voté au scrutin secret
pour 3 ans par l'Assemblée générale et
se renouvelle par tiers chaque année. Le
Comité comprend 9 membres dont le président,
le vice-président, le secrétaire-trésorier.
Très tôt, on se rendit compte que le
nombre de membres du Comité était
insuffisant et on modifia les statuts en
conséquence. Avec la création des
groupes régionaux à partir de 1907, le
président ou le délégué de chaque
groupe régional devinrent membre de droit
du Comité. Pendant la Première Guerre
Mondiale, toute activité associative étant
interdite en Alsace, le Comité se mit en
sommeil, sauf pour une réunion en mai
1917. En effet, suite à une législation
sur l'obligation de remettre à l'État
allemand des titres suédois, danois et
suisses par les propriétaires allemands
domiciliés dans le Reich, le bureau de
trois membres (président, secrétaire- trésorier
et assesseur) de notre Association qui
possédait pour 5000 F d'obligations
suisses 1908 à 4 % décida de les vendre
à la Banque de Mulhouse.
Les activités du Comité
reprenaient dès le 1er février 1919. En
temps normal, le Comité se réunit 3 à 4
fois par an, mais en périodes de crise,
notamment dans les années 1919 et 1920,
on comptait jusqu'à 10 réunions. Les
nouveaux statuts de 1919, influencés par
les initiatives spinaliennes, fixèrent le
nombre des membres du Comité à 12 avec
deux vice-présidents et séparèrent les
fonctions de secrétaire et de trésorier.
On relève que, pendant ce siècle, la durée
de mandat de 10 présidents sur 12 n'a pas
dépassé 10 ans, le record étant détenu
par Pierre LAUER avec 29 ans de présidence.
Une des difficultés d'une
Association d'anciens élèves est
d'inciter les étudiants diplômés à
s'inscrire dès la sortie de l'École. Un
an après l'année de sa fondation en
1896, l'Association ne comptait que 200
membres alors que l'École en avait déjà
formé 1000. Une autre difficulté, la
connaissance des adresses des anciens élèves,
fut régulièrement abordée par le Comité
en lançant des questionnaires. Mais le
succès de ces opérations fut souvent
mitigé. Ainsi en 1907 par exemple, sur
1180 élèves répertoriés, l'adresse de
510 était inconnue. En 1903, Charles
WELKER dessine une belle carte de membre
remise à chacun (Annexe N°
36).
Malgré tous les impondérables, le
nombre d'adhérents grimpait rapidement
pour atteindre en 1931 un pic de 921
membres, pour baisser régulièrement
jusqu'à la guerre de 1939/45 et reprendre
allégrement vers un deuxième sommet de
940 membres en 1956 (Graphique en Annexe N°
37). Toutefois, en appliquant avec plus de
rigueur la règle inscrite dans les
statuts excluant les membres en retard de
paiement de cotisation depuis plus de deux
ans, on fit chuter le nombre de membres.
Depuis, le nombre d'adhérents baissait
pour se stabiliser pendant les trente
dernières années à 500 ou 600. En 1995
l'Association compte 524 cotisants alors
que l'école a formé environ 5000 élèves
en 135 ans.

Qui sont nos Anciens ?
Lors de la fondation de l'école en
1861 par la S.I.M., la Direction classait
les élèves selon leur origine sociale en
3 catégories : les fils de patrons, les
fils de directeurs et les autres. L'écolage
de 600 F par an, correspondant au salaire
annuel d'un ouvrier auquel il faut, d'après
une étude du Dr. PENOT de 1842, un
minimum vital de 400 F pour subsister,
devait éliminer pas mal de jeunes gens
modestes.
Selon l'annuaire des Anciens de
1905, les patrons d'usines appelés
manufacturiers représentaient 28 % des
348 membres de l'Association. Aujourd'hui,
même si on n'établit plus ce genre de
statistique et que la notion même du
"patron" du XIXe siècle a
disparu, on peut affirmer qu'il y a peu de
"fils de patrons". Les emplois
des Anciens évoluent considérablement en
un siècle. Selon le même annuaire de
1905, sur les 348 Anciens on trouve 2
"rentiers" et 143 gérants,
directeurs ou sous-directeurs (41 %) ; 37
% travaillent en Alsace, 30 % dans les
autres départements de France notamment
dans ceux de l'Est, 7 % en Allemagne et 26
% dans d'autres pays, Italie, Russie,
Espagne, Belgique, Suisse, Portugal,
Autriche, États-Unis, Turquie, Égypte, Brésil,
Indes, etc... En ce qui concerne leur
nationalité, rappelons la belle envolée
lyrique à l'occasion d'une excursion des
Anciens à la Schlucht en juin 1909 où le
président STORCK s'exclama "On ne
demande pas s'il est Allemand, Français,
Italien, Anglais, etc... mais simplement s'il est ancien élève de
l'École". Dix ans plus tard, en 1919,
cette affirmation était caduque puisqu'on
expulsa les Allemands et les Autrichiens
de l'Association.
En 1995, sur 524 Anciens, 132 soit
24 % sont retraités. Quant aux 321 actifs
ayant indiqué leur lieu d'activité, 34 %
travaillent en Alsace, 54 % dans les
autres départements français, 2 % en
Allemagne et 10 % dans d'autres pays,
Suisse, Pays-Bas, Belgique, Luxembourg,
Espagne, Maroc, Tunisie, Côte d'Ivoire,
Afrique du Sud, Canada, Mexique, Hong-Kong, Australie. Il n'est pas possible
d'en tirer une conclusion car les deux
populations d'Anciens de 1905 et de 1995
ne peuvent être comparées. Avant 1914,
la plupart des élèves s'inscrivaient à
l'Association des anciens élèves, alors
que depuis 1945, peu d'étrangers s'y
trouvent.
Quant à leur âge ou plutôt leur
ancienneté, les écarts se creusent. En
1905, les plus vieux, sortis de la première
promotion de l'école en 1861/62, ne
pouvaient avoir que 44 ans d'ancienneté
et en tout état de cause, l'espérance de
vie était nettement plus faible. En 1995,
19 Anciens appartiennent à des promotions
d'avant 1939, le plus ancien de 1922, soit
63 ans d'ancienneté.
Autre évolution remarquable, la féminisation.
Pendant près de 80 ans d'existence de l'école,
aucune femme n'a fait d'études textiles.
Cela n'a rien d'étonnant puisque la
plaquette de présentation de l'École de
1930 affirme péremptoirement
"l'École n'admet que des jeunes
gens". Il faut attendre 1939 pour
trouver deux jeunes femmes diplômées en
textile. Par contre, à l'École de Chimie
de Mulhouse, la première jeune fille
s'inscrivit en 1908 ! Mais à l'École
textile, il fallut encore près de 30 ans
supplémentaires avant qu'un contingent d'à
peine 10 % de femmes se lançât régulièrement
dans ces études techniques. Enfin en 1984
une femme est élue au Comité de
l'Association. Toutefois en juin 1908, ces
messieurs se consolent de voir ces dames
participer avec des enfants à la première
excursion au Ballon d'Alsace organisée
par l'Association.
À la première Assemblée générale
en 1897, on élit des membres honoraires :
le président et des membres du CA de l'École Gustave DOLLFUS, Camille De
LACROIX, Alfred WENNING directeur de la
S.A.C.M., Jacques-Mathieu WEISS, Albert
ROHR, et des anciens professeurs à l'école
Jean HAEFFELÉ, Fernand ZUNZER, ainsi que
les examinateurs. Une subtilité latine,
inexistante dans les statuts de 1896, fait
une distinction dans ceux de 1919 entre
les membres d'honneur qui sont "des
personnes ayant rendu des services signalés
à l'École, à l'Association ou à
l'industrie textile" et pour
lesquelles le paiement de cotisation est
facultatif, et les membres honoraires
auxquels on impose des cotisations sans
limite supérieure. Leur nombre atteint près
d'une centaine en période de vaches
grasses mais a fortement diminué pour
presque disparaître dans les années
1950. Relevons parmi les personnalités
marquantes, outre les industriels d'avant
1939, bienfaiteurs de l'École ou acceptant
les visites de leurs usines, l'emploi de
stagiaires et les embauches d'étudiants :
le député Théodore SCHLUMBERGER de
Mulhouse en 1900, le député et Ministre
du Travail Paul Léon JOURDAIN en 1920
(1878-1945, dirige en 1911 avec son frère
Aimé - promo 1887 - les Filature et
Tissage X. JOURDAIN à Altkirch), le député
Alfred WALLACH (promo 1898/99) en 1932, le
Ministre des Finances et plus tard Président
du Conseil et Maire de Strasbourg Pierre
PFLIMLIN en 1955, etc…

32. Des activités mulhousiennes
qui perdurent
Dès la fondation
de l'Association, à la première A.G. du
1er mai 1897, le président BICKING
rappelle les buts de l'Association, entre
autres "favoriser les relations
amicales entre différentes promotions,
donner la possibilité de se perfectionner
dans sa spécialité et dans des questions
d'intérêt général, sans porter préjudice
aux secrets de fabrication... par
l'organisation de réunions mensuelles à
Mulhouse où seront discutés des sujets
techniques qui pourraient être publiés
ultérieurement". Pour le groupe de
Mulhouse, on met en place une structure légère,
un président et un secrétaire qui
devraient animer les rencontres, soigner
la convivialité et trouver des sujets de
conférences techniques, de visites
d'usines, etc…
Quant au local des rencontres, les
Mulhousiens se réunissent d'abord chaque
semaine dans la salle de l'étage du
restaurant Luxhof, autour du "Stammtisch".
Par contre les réunions du Comité
central se tiennent toujours au bureau de
l'usine du président. Mais après la
Première Guerre Mondiale, on éprouve le
besoin d'un local plus spacieux et on loue
à partir de février 1919 pour 250 F par
mois avec un service payant de boissons,
la salle de répétition de la musique
CONCORDIA, place du Nouveau Quartier N°
4. Le groupe y tient les rencontres
hebdomadaires amicales du mercredi soir,
les causeries techniques et les réunions
du Comité central. Mais quatre ans plus
tard, se rendant compte du coût de loyer
élevé pour une occupation insuffisante,
on abandonne la location du local au
profit du Salon vert du Café MOLL. Avant
la crise économique de 1929, on se met à
rêver "On aura peut être un jour
une Maison des anciens élèves".
Mais ce ne fut qu'un fantasme. On change
plusieurs fois de local dans l'espoir de
rassembler davantage d'Anciens. En 1951 on
quitte le MOLL trop bruyant à cause de
l'orchestre, pour le Café GATTANG place
Franklin. En 1969, on passe du Bureau de
l'Association de la S.I.M. au Caveau du théâtre,
sans pour autant attirer davantage
d'Anciens.
Formation continue centenaire
Ces réunions techniques sont concrétisées
dès l'automne 1898 par des conférences
présentées une fois par mois durant
l'hiver un samedi soir dans la salle du
Luxhof, en langue française ou allemande,
fréquentées par 50 à 70 auditeurs,
anciens élèves. Les thèmes techniques
suivants sont abordés, un vrai programme
de formation continue inspiré par les préoccupations
du moment : "Histoire de la filature
et du tissage" par BRUGGEMANN,
"Les machines textiles" illustré
par des projections, par BRUGGEMANN,
"Les presse-balles LOWRY pour
coton" par WILKENS de Brême,
"Principes des moteurs électriques"
par GÉGAUFF "Le calorifugeage"
par le chimiste PASQUAY, "Utilisation
de l'acétylène" par BRUGGEMANN,
"Courroies de transmission" par
LEVERD-DRIEUX, "Brevets
allemands" par BRUGGEMANN, "Législation
professionnelle" par un avocat,
"Le ciment armé" par ZUSLIN de
Strasbourg suivi de la visite du nouveau bâtiment
de la filature Charles MIEG,
"Nouvelle pompe révolutionnaire système
RIEDLER" par l'ingénieur en chef HUF
"Contribution à la connaissance de
la chimie des fibres textiles" par
Dr. GASSMANN-ENGEL, "Les
encolleuses" par BICKING, "Récents
brevets français, allemands et anglais en
filature et tissage" par BRUGGEMANN,
etc…
Après quelques années
enthousiasmantes, ces réunions commencent
à manquer d'intérêt et notamment de
conférenciers et d'auditeurs. En 1912,
DUBOIS, responsable du groupe de Mulhouse
relance ces causeries techniques d'un soir
par mois. Lui-même traite le sujet
"Le titre moyen de filage et sa
relation avec la livraison réelle",
BRUGGEMANN reprend une série de causeries
sur "le droit du travail", dans
l'espoir que d'autres suivent. D'ailleurs,
les Spinaliens, dans leur projet de réorganisation
de l'école de Mulhouse d'octobre 1915, prévoient
une place de choix aux conférences données
par des industriels et des anciens élèves.
Si la guerre met fin à toutes ces réunions,
à la première A.G. d'après la guerre,
en juillet 1919, le président annonce que
les cinq réunions mensuelles du groupe de
Mulhouse sont fréquentées par 7 à 15
membres. Mais en 1920, plus de réunions
faute de conférenciers. L’année
suivante, on projette de les reprendre en
y invitant le Cercle des étudiants (on
versera un don de 250 F à leur caisse) et
en prenant une collation avec prestations
musicales. En 1922, un Ancien, représentant
de S.K.F. présente une conférence avec un
film sur la fabrication des aciers spéciaux
et des roulements à bille, on y invite également
les étudiants, les chimistes et les
mineurs.
Nouvelle initiative de formation
continue en 1922 : le groupe de Mulhouse
voudrait organiser des cours supérieurs
post-scolaires par correspondance pour les
directeurs qui veulent postuler pour des
places de gérants et d'administrateurs,
en recommandant les cours suivants :
- École d'Administration et des
Affaires, 100 rue Vaugirard, Paris 6e,
- École du Génie Civil, Avenue de
Wagram, Paris 17e,
- École
Universelle
par correspondance de Paris, 10 rue
Chardin, Paris 16e.
En 1923, un ingénieur de la
S.A.C.M. parle, au cours d'un dîner, des
forces motrices hydroélectriques et on
donne une conférence sur "Les grands
étirages" suivie d'un dîner amical
pour 14 F. Autre conférence en 1926 qui
s'adresse également aux contremaîtres
des tissages de Mulhouse, sur le nouveau métier
RÜTI avec présentation d'un film de 900
m de long (sic) montrant les détails du métier
au ralenti. Quelques jours plus tard,
l'ingénieur en chef de la S.A.C.M.,
membre du Comité, élève une vive
protestation contre ce film de RÜTI
"qui n'était que de la réclame"
alors qu'on avait promis un film purement
technique. La crise économique à partir
de 1929 perturbe les réunions amicales du
groupe. Ce n'est qu'en 1934 qu'on décide
de reprendre les réunions avec
discussions techniques qui sont de nouveau
très bien fréquentées. En 1936 on parle
du système BEDEAUX et du filage de la
laine cardée, en 1939 du travail des fils
et tissus élastiques, de l'organisation
du travail, des impôts et des assurances
accident .
Après l'interruption due à la
guerre 1939/45, on décide de reprendre
les causeries, en 1946 "Les fibres de
verre", un an plus tard, un thème à
la mode "L'organisation scientifique
du travail" et
"L’encollage", en 1949
"la qualité en filature" et
"le cannetage", en 1951 avec
"Voyage d'études en Amérique du
Sud" et "Voyage d'études aux
USA". Ces conférences attirent de
moins en moins d'auditeurs et il faut
attendre les années 1961 et l'action
dynamique de Pierre SIEGER, responsable du
groupe de Mulhouse, pour découvrir de
nouveaux titres : "Applications des
fibres acryliques", "Psychologie
appliquée à la sélection du
personnel", "Filature des fibres
synthétiques", "Le régime des
retraites des cadres" ,
"Assurance vie", "
Application de l'ordinateur à l'industrie
textile", "Gestion industrielle
par ordinateur dans l'industrie mécanique",
"Le système japonais de
filature" et, plus classique,
"Caractéristiques du coton", néanmoins
les participants sont peu nombreux.
Innovation après les événements
de mai 1968, révolution qui a également
secoué nos étudiants : la tentative d'améliorer
les relations entre Anciens et étudiants
au cours d'un dîner offert par
l'Association à la promotion sortante.
"Nos jeunes expriment leurs craintes
face à l'avenir et les doutes quant à la
valeur du choix d'une carrière dans une
industrie en perpétuelle mutation et
convulsion". Ces rencontres débats
entre étudiants de troisième année et
Anciens sont reconduits chaque année par
le Comité autour d'un apéritif, d'un
cocktail ou d'un buffet campagnard ou à
l'occasion d'un dîner. Elles permettent
aux jeunes d'entrer en contact avec des
hommes de terrain, entre autres pour la
recherche de stage de fin d'études voire
pour une première embauche.
Petit à petit, ces réunions
mensuelles du groupe de Mulhouse, avec ou
sans conférence, souffrent d'un manque
chronique de participants. Plus tard
d'ailleurs, la formation continue,
structurée et payante, élaborée et
proposée par l'École, par le Centre de
Recherche Textile de Mulhouse (C.R.T.M.)
ou par le Service de Formation Continue de
l'Université de Haute-Alsace (S.E.R.F.A.),
s'est institutionnalisée. Nos hommes
semblent trop sollicités par ailleurs et
nos étudiants taraudés par la recherche
d'un emploi, d'où de nouvelles pistes à
explorer : des conférences-débats
"opération carrière" entre
Anciens et jeunes. Depuis 1987, on
s'oriente vers des exposés faits à l'École dans le cadre des Assemblées générales
annuelles des Anciens, p.ex. "les
fonctions et le rôle du jeune ingénieur",
"Évolution de l'informatique jusqu'à
l'an 2000", "Textile et
recyclage, marché d'avenir", etc…
Visites d'usines instructives
Si les visites d'usines par les étudiants
font de tout temps partie du programme
scolaire, ce sont les Anciens d'Épinal qui
inaugurent en 1905, la tradition de
visites d'usines au cours d'excursions,
reprise en 1907 par le groupe d'Anciens de
Belfort (Annexe N° 37
A). Nous avons
longuement évoqué ces deux sorties
studieuses. D'autre part, presque chaque
Assemblée générale des Anciens est précédée
de visites d'usine, frisant parfois la
boulimie. Ainsi à l'excursion à Belfort
de juillet 1906, en une seule matinée près
de 100 Anciens visitent en plusieurs
groupes la filature modèle
KULLMANN-NAEGELY, la filature de laine
peignée SCHWARTZ, plus tard, la nouvelle
filature VAUCHER construite en béton armé,
la S.A.C.M., la nouvelle Centrale électrique
de la ville de Mulhouse avec sa machine à
vapeur (le déplacement se fait en calèches).
Une vraie course d'obstacles ! Tout le
monde est ravi de voir "ces usines
qui sont à l'avant-garde des
installations sociales". Bien qu'il
fut difficile d'obtenir des autorisations,
il fallait envisager de visiter également
des établissements d'autres régions,
"des industriels lyonnais font bien
visiter à leurs employés des usines
allemandes", signale-t-on. Dernière
visite avant la guerre à l'A.G. de 1912,
52 Anciens descendent à 680 m sous terre
pour visiter la Mine de Potasse Amélie.
L’École fait visiter aux élèves
des usines textiles, filatures, tissages,
ennoblissements, mais aussi de
constructions mécaniques et d'accessoires
textiles, de tissage de toiles métalliques,
de laboratoires, de chimie, de brasseries,
de menuiseries, de musées, etc... aussi
bien en Alsace qu'à Bâle. En 1906, le
manufacturier Paul KULLMANN fonde un prix
de 800 Mark offert à deux jeunes diplômés
sortants, membres de l'Association, qui
devaient visiter le matériel de filature
à la Foire de Milan, le matériel de
tissage à la Foire de Tourcoing,
plusieurs usines à proximité de la foire
sur recommandation de l'école, après
quoi ils devaient rédiger un rapport
illustré de dessins sur les moteurs et
les chaudières, les nouveautés
concernant l'éclairage électrique et le
transport d'énergie, les machines
textiles, les schémas des bâtiments,
l'implantation des machines et sur les
conditions de travail des ouvriers. Du
pain sur la planche !
Dès l'A.G. de 1921, la fringale des
découvertes techniques se manifeste à
nouveau. A partir de cette année, on
visite successivement plusieurs puits des
Mines de Potasse, les Forces Motrices du
Haut-Rhin, les Houillères de Ronchamp, à
plusieurs reprises l'avancement du
chantier de la Société de l'Énergie Électrique
du Rhin à Kembs, de 1930 à
1939, la Brasserie de Mulhouse, la
Manufacture de Glaces, les Bains
Municipaux, l'Usine à gaz, la chaufferie
et le poste de signalisation de la gare de
Mulhouse, le Port de Strasbourg, etc…
Après la Deuxième Guerre mondiale les
visites reprennent mais pas systématiquement,
notamment durant les 20 dernières années,
revisite de Kembs reconstruit, Bains
Municipaux, les installations de surface
du puits d'Ensisheim des Mines de Potasse,
à plusieurs reprises le chantier de
l'usine hydroélectrique d'Ottmarsheim,
l'Usine à gaz, la S.A.C.M., DECK, RIETER
à Winterthur, le centre d'aiguillage et
de signalisation de la gare, SULZER à
Winterthur et à Soleure, le Tissage de
Bourtzwiller, PEUGEOT à Sochaux, ROTI à
Winterthur, RHÉNAMÉCA à Ottmarsheim, le
Port de Mulhouse, N. SCHLUM BERGER à
Guebwiller, MAB à Soultz, BRAECKER à
Wintzenheim, les Cartonneries de
Kaysersberg à Kunheim, Chaux et Ciments
PORTLAND à Altkirch, les Zones
industrielles de Mulhouse sous la conduite
du sénateur STOESSEL, l'Imprimerie du
journal L'Alsace, RHENALU à Biesheim, les
Tuberies DOLL TEMPÉ à Ingersheim, la
Manufacture Alsacienne de Produits Métalliques
à Wintzenheim, l'Aéroport de Mulhouse-Bâle,
les Arts Graphiques DMC, CLEMESSY, la
Caserne des Sapeurs Pompiers, le Musée du
Chemin de Fer, le Musée de l'Impression,
le Port de la CCI, les Services techniques
de la gare des voyageurs, le Musée du
Papier Peint, etc…
Actions sociales
Le souci de l'aide aux anciens élèves
est inscrit dans les statuts de 1896, où
son article 17 précise : "Tout sociétaire
connaissant une place vacante est prié
d'en informer immédiatement le secrétaire,
celui-ci se concertera avec quelques
membres du Comité pour le choix du sociétaire
à recommander". Dès la troisième
Assemblée générale, en juin 1899, un
bureau de placement est créé et une
circulaire envoyée à tous les
industriels les rendant attentifs à cette
nouvelle institution et les engageant à
en faire usage.
Mais au-delà de l'assistance aux
anciens élèves que doit assurer
l'Association pour la recherche d'un
premier emploi ou, plus tard, pour
faciliter leur évolution de carrière,
bien d'autres formes de soutien et d'aide
s'ajoutent à cette initiative au fil des
ans et selon les besoins :
- soutien aux nécessiteux par la
création en 1907 d'un fond de solidarité
avec les finances de l'Association, en
1909 on souhaitait arriver à un capital
de 100.000 Mark afin que les intérêts
puissent être mis à la disposition des nécessiteux
; en 1930, un Ancien de Paris sans emploi
sollicite un prêt de 400 F qui n'est
jamais remboursé,
- conseil juridique commercial et
social en 1907,
- conseil pour l'assurance-vie en
signant en 1903 un accord avec la société
GOTHA ; en 1919 un accord passé avec la
Société d'assurance-vie LE PHÉNIX et un
autre pour les assurances-accidents avec
la Société PROVIDENCE prévoit des réductions
pour les membres de l'Association,
- conseils pour la caisse de
retraite et projet de fondation d'une
telle caisse demandée en 1924 par les
Belfortains, examinée à plusieurs
reprises et encore en 1936 par des
experts,
- revendications salariales : à
l'A.G. de juillet 1920, une demande des
groupes d'Épinal et du Nord d'effectuer
des démarches auprès du patronat par
envoi d'une circulaire en vue du relèvement
des salaires des cadres est soutenue
verbalement par tous les groupes mais ne
fut concrétisée que par les Mulhousiens
qui en subirent des conséquences désagréables
; une démarche analogue est repoussée en
1924 du fait que "notre Association
comprend toutes les catégories
professionnelles, employeurs et employés,
et n'est pas un syndicat",
- gratuité pour les annonces de
recherche d'emploi demandée par les
Strasbourgeois en 1939,
- fondation d'une prime pour les
meilleurs travaux techniques, etc…
Un local pour une permanence
Pendant les vingt premières années
de l'existence de l'Association, tout le
travail administratif d'assistance est
effectué bénévolement par les membres
du Comité, notamment par le secrétaire-trésorier
qui prend en charge avec l'aide du
directeur d'École le bureau de placement.
Quant au local, trois chambres
entretenues, éclairées et chauffées
sont mises à la disposition de
l'Association dans la maison de BRUGGEMANN
qui loge et offre le petit déjeuner à
des stagiaires travaillant pour la Revue.
En 1919, avec l'entrée au Comité de
Pierre LAUER alias LEDUC, venant de Paris,
de grands projets sont échafaudés. LAUER
propose de louer un bureau pour les
travaux et un magasin pour déposer les
archives et de scinder la fonction de secrétaire-trésorier
en 4 postes. A partir de 1921, une pièce
dans la villa DUBOIS au 11 b rue de
l'Argonne, président de l'Association et
directeur de la Revue, est mise à la
disposition de l'Association et la fille
du président y est employée, un crédit
de 6000 F est voté à cet effet. Après
le décès de DUBOIS, on loue en octobre
1925 un local au 3 rue du Chêne pour
installer le siège de l'Association, le
bureau de FROEHLIGER embauché pour la
direction de la revue et la permanence. Le
Comité estime toutefois que pour le
placement des étudiants le directeur Frédéric
ORTLIEB est le plus qualifié. Le beau rêve
émis en 1929 d'une Maison des Anciens élèves
ne se réalisera jamais. En 1934 on emménage
dans un autre local loué au rez-de-chaussée
du 21 rue des Vergers pour un loyer de 250
F par mois. Ce bureau est fermé au début
de la guerre.
Après la Deuxième guerre
mondiale, le bureau de placement reprend
ses travaux dès le mois de mai 1945.
Jusqu'en 1950, le sous-directeur de l'école,
MARTIN installé dans un local mis à la
disposition par l'École, s'occupait du
placement, puis BRITZEL aidé par le
directeur Victor HILDEBRAND. A partir de
1956, le Comité renforce les moyens
d'action de l'Association en installant le
bureau dans les bâtiments de la S.I.M. et
en embauchant une secrétaire, Madame
REINBOLD qui assure chaque après-midi une
permanence. Elle prend sa retraite et est
remplacée début 1976 par Madame Alice
GEORGER.
Un office de placement efficace
En 1903, on constate avec
satisfaction que 16 anciens élèves et
l'année suivante 15 ont trouvé du
travail grâce à l'Association qui envoie
chaque trimestre une circulaire aux
industriels. En 1905, 24 camarades sont
embauchés, mais les offres de places avec
beaucoup d'expérience ne peuvent plus être
satisfaites. En 1907, l'année du boom de
l'industrie textile, on n'a pas assez de
candidats pour répondre à toutes les
demandes.
Les reproches de favoritisme dans
le placement en entreprise ne manquent
pas. A l'A.G. de 1904 on trouve qu'un
"membre honoraire a favorisé
l'embauche d'un ancien non-membre de
l'Association, ce qui est contraire à la
solidarité morale". Par contre, on
critique les Anciens qui n'engagent pas
suffisamment par l'intermédiaire de
l'office de placement. La création d'un
groupe régional à Belfort en 1907 entraîne
une certaine autonomie dans les démarches
de placer les Anciens dans la région de
Belfort ; toutefois, le groupe se plaint
que les Belfortains ne réussissent qu'à
placer 5 des leurs auprès de leurs
industriels et accusent les Mulhousiens de
faire barrage ; un nouveau système de
fonctionnement basé sur des "hommes
de confiance" est élaboré, sans
plus de succès. En fin de compte on
revient au principe du bureau à Mulhouse
centralisant les demandes et offres. Après
1920 les places vacantes ne sont communiquées
qu'aux élèves sortants et aux Anciens
qui en expriment le souhait.
En 1946, le bureau de placement a
des ennuis avec l'Administration du
Service de la Main-d’œuvre qui aurait
voulu garder le monopole et le contrôle
du placement des demandeurs d'emploi, mais
après quelques démarches et la démonstration
de l'ancienneté et de l'efficacité de
notre service, notre office de placement
pouvait continuer ses travaux.
A partir de 1966, les annonces
d'emplois disponibles sont largement
diffusées dans les Annales Textiles, puis
dans le Bulletin d'Information des
Membres. Comme conséquence à l'élargissement
de la formation de nos étudiants, une
nouvelle méthode de collecte des offres
d'emplois est adoptée en 1979. On diffuse
non seulement dans le B.I.M., mais aussi
à tous les demandeurs, toutes les offres
de l'industrie textile reçues à notre
office de placement, mais également
celles publiées pour des industries
annexes dans une dizaine de périodiques
techniques et commerciaux, textiles et
autres, nationaux et internationaux. A la
suite de cette initiative, des Cabinets de
recrutement avec lesquels nous entretenons
de bonnes relations font souvent appel à
nos services. Les résultats de placement
de ces 15 dernières années en sont
notoirement améliorés.
On trouve en annexe N° 38 l'évolution
des offres et demandes d'emploi et des résultats
obtenus par le bureau entre 1920 et 1995.
Ces chiffres reflètent évidemment aussi
la situation économique de l'industrie
textile.
La convivialité par les
excursions, sorties et rallyes
La mode des sorties se propageant,
nos Anciens décident en juin 1908
d'organiser une excursion au Ballon
d'Alsace pour retrouver les Belfortains et
les Vosgiens, "respirer l'air pur des
Vosges et de la liberté" et boire du
vin rouge, symbole de la France de la
belle époque. "Les Alsaciens montent
à pied depuis Sewen, les Vosgiens et
Belfortains, profitant des deux bonnes
routes de Saint-Maurice et Giromagny - on
y organise annuellement des courses
automobiles - s'y rendent en voitures à
cheval, bicyclettes, automobiles, etc…
Qui arrive en premier vers 11 h à l'Hôtel
LALLOZ ? Bien sûr, les Alsaciens à pied
! Après de nombreux apéritifs, la
soixantaine d'excursionnistes, y compris -
autre innovation remarquable - des dames,
enfants et invités, montent au Ballon
pour jouir d'une magnifique vue sur la
plaine. Après le banquet, les discours,
les multiples toasts au champagne, on
prend le chemin de la descente non sans s'être
promis d'entreprendre l'année suivante
une nouvelle excursion dans les
Vosges". Effectivement, en juin 1909
on se retrouve à 72 participants, grâce
au petit train, à la Schlucht. On se
rappelle qu'il y a quelques mois,
GUILLAUME 11, l'Empereur d'Allemagne, y a
fait une excursion se terminant par une réception
dans le chalet de chasse de l'Altenberg
appartenant à l'Industriel HARTMANN à
Munster où, il y a 40 ans, NAPOLÉON III
avait été accueilli dans le même chalet
par le père de l'industriel. Après un
rafraîchissement à l'Hôtel DENAFROUX,
on grimpe au restaurant du Hohneck. Sa
salle à manger est occupée par un groupe
de 400 excursionnistes du Nord de la
France y faisant une halte avant de
continuer un périple vers Baden-Baden.
Bussang est la destination de la rencontre
de juin 1910. En dépit d'une pluie bien
vosgienne, 80 membres s'y retrouvent avec
quelques dames et des invités, quelques
Anciens d'Alsace y sont montés à pied,
des Belfortains et des Spinaliens en
automobile. Le banquet à l'Hôtel aux
Deux Clés suivi des discours et des
toasts au champagne créent une joyeuse
ambiance. L'année suivante c'est l'Hôtel
Cheval de Bronze à Cornimont - très éloigné
des lignes de chemin de fer - qui
accueille les Anciens du textile, malgré
un temps exécrable. Après la visite des
usines Les Héritiers de Georges PERRIN,
on se retrouve dans la salle décorée aux
couleurs françaises et alsaciennes. La
musique de la filature et le bon vin réchauffent
l'ambiance. Comme il est difficile de
trouver un autre lieu facilement
accessible aux trois groupes , on refait
en 1912 le choix du Ballon d'Alsace, les
Mulhousiens arrivant par Sewen ou
Wesserling. Les excursions de juin 1913 à
la Schlucht et de juin 1914 sont les dernières
avant la longue interruption de la guerre.
Après le cataclysme, le Comité essaie de
reprendre la vieille tradition, toutefois,
le choix des sites visités est davantage
marqué par les souvenirs douloureux de la
guerre, les excursions deviennent des pèlerinages,
en juin 1920 au Drumont, en 1921 au
Hartmannswillerkopf. Puis les sorties se
raréfient, en 1924 aux Trois-Epis et en
1928 aux Houillères de Romchamp.
Après les années de crise économique,
on reprend l'idée de sorties conviviales
communes en automne. Les vendanges de 1937
attirent des Anciens de Mulhouse, Colmar,
Strasbourg et Belfort à un déjeuner à
"La ville de Nancy" à
Ribeauvillé, suivi d'une visite de cave.
En octobre 1938 GAERTNER à Ammerschwihr
est le but de la sortie avec visite de la
cave SCHOECH. Mais une nouvelle guerre
casse l'élan excursionniste. Il faut
attendre mai 1948 pour la première sortie
à Ammerschwihr chez GAERTNER (déjeuner
de 400 à 500 F).
A partir de 1966, le Comité
organise régulièrement des sorties
d'automne avec dîner parfois suivi d'une
soirée dansante. Elles jouissent d'un
succès notoire, la première année une
soixantaine de participants à Eguisheim,
76 l'année suivante à Niedermorschwihr ;
à partir des années 1970, une présence
de 50 à 100 participants, à Kaysersberg,
à Mittelwihr, à Wintzenheim, à
Thierenbach, à Kientzheim, à
Village-Neuf, à Diefmatten, à Westhalten,
à Hochstatt, à Moosch, à Habsheim.
Sous l'influence de l'évolution démographique
sur la population des Anciens et la
propension des industriels de mettre de
plus en plus tôt les vieux cadres à la
retraite, le nombre de retraités de notre
Association augmente sensiblement. Ainsi,
à partir de 1975, Edouard DERESINSKI,
plus tard Henri ABEGG, organise avec le
Comité et le secrétariat un ou deux déjeuners
annuels, parfois précédés d'une visite
de musée, pour une quarantaine de retraités
qui se nomment - les euphémismes sont à
la mode - "Le Club des toujours
jeunes". Presque tous les bons
restaurants de notre région ont eu le
privilège de les accueillir, mais nous
nous abstenons d'indiquer le nom des
restaurants afin de ne pas transformer
cette énumération en guide gastronomique
des textiliens : Bitschwiller, Wettolsheim,
Ostheim, Riedisheim, Trois-Epis, Mulhouse,
Pulversheim, Guebwiller, Bruebach,
Gueberschwihr,Thann, Baldersheim,
Pfaffenheim, Wattwiller, Thierenbach,
Berrwiller, Bergholtz, Merxheim, Linthal,
Soultzmatt, Hunawihr, Bollenberg, etc…
Autre signe des temps, certaines
promotions se retrouvent tous les 5 ans
pour marquer leurs "noces" en
festoyant ensemble.
En juin 1975, des jeunes Anciens
actifs lancent une initiative connaissant
un gros succès pendant une demi-douzaine
d'années : le rallye touristique,
artistique, sportif, historique, culturel,
etc… d'une douzaine d'équipages sur une
cinquantaine de km à travers notre région.
La dernière étape de cette gaie expédition
est toujours une table bien garnie et sérieusement
arrosée.
Joyeux banqueteurs
Si statutairement, d'après
l'article 22, le banquet suit toute
Assemblée générale, pour de nombreux
Anciens, c'est annuellement l'ardente
obligation de rencontre conviviale, le
plaisir de se retrouver entre copains d'études,
la joie de se sentir une grande famille,
le partage de souvenirs exquis d'une
jeunesse imaginaire retrouvée. Sans
tomber dans l'exégèse sémantique,
relevons que le "banquet", mot
qui commence à sentir la naphtaline en
mai 1968, est remplacé cette année-là
par le "dîner amical" avant de
disparaître complètement de notre
vocabulaire. Personne ne peut dire si la
"citoyenneté" y a gagné. Par
contre on peut affirmer que les
participants, au nombre de 40 à 120 selon
les années, s'y sont de tout temps bien
amusés.
L’Assemblée Générale
Constitutive de 1896 se termine sans
banquet, mais on se rattrape par une
excellente prestation gastronomique le
soir de la première A.G. à l'Hôtel
Central et l'on note avec satisfaction que
les vins sont offerts par les honorables
messieurs ayant le plus d'ancienneté.
C'est un événement mondain important
pour les industriels mulhousiens qui reçoivent
de belles invitations imprimées avec le
menu (toujours en français, p. ex. en
1903, 32 ans après l'annexion allemande,
Annexe N° 39). On reste fidèle à l'Hôtel
Central pendant de nombreuses années,
sauf en 1904 où l'on inaugure le nouveau
restaurant du zoo, avec les incidents dont
la presse s'est fait l'écho, pour revenir
à son ancienne bonne tradition. Après la
guerre, les banquets se tiennent dans la
salle de la Bourse, au Casino, à l'Hôtel
de Parc, à partir de 1933, au restaurant
"A la ville de Strasbourg", au
Bristol, au Café de la Paix, au Zoo, au
Buffet de la Gare, à Thann, à
Riedisheim, après 1950 à l'Aéroport, au
Caveau du Théâtre, etc… On n'hésite
pas à banqueter à l'extérieur de
Mulhouse à partir des années 1970, à
Diefmatten, à Wahlbach, à Thierenbach,
à Uffholtz, à Blodelsheim, à Habsheim,
à Kingersheim, à Soultz, Wittelsheim, à
Moernach, etc...
Ces banquets d'autrefois, protocole
oblige, sont souvent présidés, outre le
président ou le vice-président de
l'Association, par les personnalités du
monde industriel mulhousien, Camille De
LACROIX, président d'honneur de
l'Association, Gustave DOLLFUS, président
du Conseil d'administration de l'École,
Albert KOECHLIN, de la S.I.M., Théodore
SCHLUMBERGER, ancien député, Daniel MIEG
président de la S.I.M., etc… qui
offrent le champagne. Depuis 1903, on
profite du banquet pour remettre un livre
au major de promotion, invité et se
soumettant à l'obligation d'un discours
rituel. A partir de 1945, le banquet est
présidé par jean DOLLFUS président de
la S.I.M. et vice-président du C.A. de l'École,
Paul SCHLUMBERGER, LICHTENBERGER,
directeur de l'École Supérieure de
Chimie, etc… Avec le rattachement de l'école
à l'Université, rupture de tradition,
les banquets ne sont plus présidés par
quelque notable des grandes familles
mulhousiennes d'industriels. Citons un événement
remarquable, le banquet de 1967 présidé
par le président d'honneur de
l'Association, Pierre PFLIMLIN, Maire de
Strasbourg, membre du Conseil
universitaire de Strasbourg, qui rappelle
le leitmotiv de son père, Jules PFLIMLIN
(promo 1890/91) "L’idée la
meilleure ne suffit pas au but à
atteindre, c'est la mise au point qui en
donne la consécration".
Le banquet est l'occasion pour
certains talentueux Anciens de créer une
ambiance musicale et divertissante de haut
niveau. Ainsi, quelques jeunes et vieux
Anciens, notamment ALLONAS, E. BRITZEL,
CAQUELIN, CLAUSS, DÉPIERRE, PETIT, ROMANN,
SCHEIDECKER, STIFFEL, après 1930
WIERNSBERGER, etc… mais aussi le président
de la commission d'examen Albert KOECHLIN,
offrent leurs prestations musicales, en
solo, duo ou quatuor, de chant ou de
violon, violoncelle, cor, flûte et piano,
parfois tout un orchestre de danse
improvisé. Les banquets deviennent alors
de vraies soirées musicales avec des
oeuvres de F. SCHUBERT, WAGNER-LISZT, W.
BARGIEL, W. POPP, LABITZKY, PINGLIE, BÉRIOT,
MENDELSOHN-BARTHOLDY, JOCELYN, l'air de
Mignon "Connais-tu le pays",
etc..., suivies de numéros humoristiques
de chansonniers improvisés accompagnés
au piano, des imitations nasillardes du
phonographe, des discours en vers, des
monologues en français et en alsacien déclenchant
l'hilarité générale. Le camarade ROELLY
pour sa part, chante en dialecte
mulhousien durant de nombreuses années,
avec toujours le même succès, une
vieille rengaine qui se lamente de la dure
vie du fileur mulhousien au XIXe siècle
"Milhüser Spinnerliad" (Annexe
N° 40).
Changement de registre à la première
A.G. d'après la guerre le 12 juillet 1919,
sous les couleurs tricolores. Série de
discours enflammés, dont celui du président
MEYER : "La France a gagné la
guerre, il faut maintenant qu'elle gagne
la paix, la paix par le travail"
suivi de celui de FLAMAND, président du
groupe d'Épinal qui adresse "son
hommage aux Alsaciens qui sont morts des
deux côtés des tranchées, soit en
sauveurs, soit en victimes", après
quoi une vibrante Marseillaise fait
trembler les murs. Pendant plusieurs années
retentit à la fin du banquet la
"Chanson de Verdun" ou la
Marseillaise, ce qui n'empêche pas les
artistes "maison" d'amuser la
galerie. En juillet 1939, à la veille de
la guerre, au dernier banquet avant
longtemps, l'Association offre "deux
numéros extras" aux participants,
"un militaire déguisé en civil qui
raconte des histoires marseillaises et une
gracieuse danseuse au décolleté généreux
qui évolue, accompagnée au piano dans
une valse langoureuse, avec quelques
figures acrobatiques". A quelques
occasions, on engage un orchestre pour
animer le bal qui suit le banquet.
Un phénomène extraordinaire qu'il
n'est pas possible de passer sous silence
: la tenue à table et la capacité
d'absorption (bien supérieure au taux de
reprise de la laine !) de nos Anciens du
"bon vieux temps". Il suffit de
lire quelques menus d'avant 1928 : à l'Hôtel
du Parc pour 30 F (la cotisation annuelle
est à la même époque également de 30
F) : crème Marie Louise, filet de sole
bonne femme, cuissot de chevreuil aux
primeurs, sauce poivrade, pommes
croquettes, poularde rôtie, salade de
saison, bombe Marie-Louise, friandises, le
tout accompagné d'un 1/2 litre de vin par
personne et 1/3 de bouteille de champagne
par tête offert par l'Association. Crise,
chômage et restrictions en 1934, menu
maigrichon à 22 F à la "Ville de
Strasbourg" : Oxtail clair, saumon du
Rhin sauce gribiche, poulet de grain garni
riche, fromages assortis, bombe glacée
St. Jacques, gaufrettes, 1/2 litre de
Sylvaner, café nature (des petits malins
apportent leur burette de Schnaps),
champagne offert par l'Association. Le
nombre de discours entendus à ces
banquets est impressionnant. Chaque
orateur invite, au cours de plusieurs
toasts, de "vider le verre à la santé
de ...", ce qui, à la fin de la soirée,
fait un volume respectable. On ne se préoccupe
pas de 0,5 d'alcoolémie et l'ambiance
chaude et la bonne humeur sont directement
proportionnelles au nombre de toasts. Ceci
explique que certains banquets se
terminent, comme en 1905 en rentrant du
Zoo, en bruyant défilé aux flambeaux
jusqu'à l'Hôtel de Ville, en passant
devant la maison des examinateurs auxquels
on dédie une aubade nocturne.
33. Groupes régionaux :
grandeur et décadence
Si les relations entre le Comité
central et les groupes régionaux posent
parfois quelques problèmes, ces derniers
dynamisent considérablement la vie de
l'Association et, grâce à la proximité
géographique de ses membres, ils créent
des relations privilégiées entre les
Anciens d'une même région. Pourtant, ni
les statuts de 1896 ni ceux de 1919 revus
en 1931 ne font allusion à ces groupes régionaux
dont la création est encouragée par le
Comité dès qu'une petite vingtaine de
membres se retrouvent dans un secteur géographique
donné. Les groupes les plus virulents, Épinal, Belfort, Lille et Paris, se créent
encore avant la guerre de 1914/18, souvent
dans le but d'établir des liens entre les
Mulhousiens et les départements français
perdus après l'annexion. "Ici on
respire l'air pur des Vosges et surtout
celui du pays de la liberté"
s'exclame le président de l'Association
STORCK à l'occasion d'une sortie commune
des Anciens de Mulhouse, Belfort et Épinal
à Bussang.
Des tentatives de fondation de
groupes en 1907 à Moscou par le camarade
OCHS et à Milan, au Mexique, en Argentine
ne sont souvent que des feux de paille. La
reprise après la guerre n'est pas facile,
Lyon ne veut plus collaborer, Tourcoing et
Roubaix ne répondent pas, mais Épinal va
toujours bien. Entre 1919 et 1939, des
groupes se forment, s'endorment, se
reforment et se meurent à Lyon, Rouen,
Colmar, Strasbourg et même des
sous-groupes à Guebwiller et
Sainte-Marie-aux-Mines, des essais
avortent à Roanne pour réussir plus
tard. Après 1945, si les groupes de
Belfort, Lille, Épinal, Paris, Colmar,
Mexique (qui fait un don de 1100 dollars
à l'Association) reprennent contact avec
le Comité de Mulhouse et sont régulièrement
représentés aux Assemblées générales,
des essais sont tentés en Egypte, au
Portugal, en 1974 en Tunisie et un nouveau
rassemblement fondé à Troyes, mais leurs
activités déclinent après quelques années.
Certains groupes jouissent d'une
vie passionnante, d'autres traînent dans
la morosité et s'usent très vite, au gré
d'un président, d'une équipe dirigeante,
d'une mutation professionnelle, etc...
Leurs relations avec le Comité de
Mulhouse, théoriquement structurées par
des Règlements Intérieurs, prennent des
allures erratiques, se resserrent ou se
disloquent, au gré des circonstances.
Vers les années 1980, avec l'accélération
des rythmes de vie et de travail,
l'individualisme aidant, les groupes régionaux
constitués disparaissent. Aux Assemblées
générales à Mulhouse, on retrouve avec
plaisir des Anciens venus individuellement
des quatre coins du monde pour se
requinquer dans l'ambiance mulhousienne.
Les remuants Vosgiens sont les
premiers
Dès la première Assemblée générale
du 1er mai 1897, MATHEY, un Ancien d'Épinal
demande qu'une réunion annuelle des
Anciens se tienne dans la chef-lieu des
Vosges à laquelle les président et secrétaire
de Mulhouse devraient participer. Mais,
comme les statuts prévoient que le siège
est à Mulhouse, on ne voulait pas accéder
à cette demande, "ce qui n'empêchent
pas des Anciens d'effectuer des excursions
privées à Épinal". Un an plus tard,
le même MATHEY avertit le Comité
mulhousien qu'il veut créer avec les
nombreux Anciens de la région d'Épinal un
groupe vosgien, mais se heurte encore à
l'hostilité des Alsaciens qui craignent
des tendances séparatistes. L'opiniâtreté
des Vosgiens ne désarme pas et le 1.
octobre 1899 un groupe de 24 Anciens se réunit,
décide de créer un comité d'une
"section française" avec des
statuts, des finances et une
administration autonomes et siège et
administration à Épinal. Ils invitent à
la réunion suivante le président
BICKING. Bousculé par les Spinaliens, le
Comité mulhousien réticent propose de
fonder un "groupe régional" et
non pas une "section française"
et convoque une assemblée générale
extraordinaire pour mai 1905 à Épinal.
Les Anciens d'Épinal font bien les
choses en préparant une rencontre festive
qui dure deux jours. Levés très tôt,
les Mulhousiens arrivent en gare d'Épinal
à 9 h 52 accueillis par de nombreux
Anciens. Deux groupes se forment pour
visiter au pas de charge les Filatures et
Tissage V. PETERS à Nomexy où ils déjeunent
au champagne. L’après-midi les
filateurs visitent une filature à Igney
et les tisseurs la maison ZIEGLER à Épinal, ensuite ensemble les Ets. DAVID
& MAIGRET A 19 h apéritif et dîner
au Grand Hôtel après quoi des petits
groupes font des descentes dans différentes
auberges de la ville où le vin rouge
coule à flots joyeux. Ce qui ne les empêche
pas d'être présents dimanche matin à 7
h 30 pour visiter ensemble les curiosités
d'Épinal et l'École professionnelle de
la ville où des sections de filature et
de tissage pour dispenser des cours de préparation
à l'École de Mulhouse sont en cours de
création. (Bien qu'à cette époque on
n'envisage officiellement pas de créer
une école concurrente, ce sont les prémices
à la fondation en 1913 de l'École de
Filature et de Tissage d'Épinal). A 10 h
30 grand rassemblement de tous les Anciens
dans la grande salle du Syndicat cotonnier
de l'Est sous la présidence de BICKING,
président des Anciens de Mulhouse,
accompagné du secrétaire-trésorier
BRUGGEMANN. Re-banquet au Grand Hôtel
avec 54 Anciens et quelques élèves
textiles d'Épinal, discours enflammés,
champagne, ambiance musicale, quelques
joyeux lurons manient l'archet du
violoncelle ou se lancent dans l'imitation
d'un phonographe nasillard. Une fête
inoubliable que FLAMAND demande de
renouveler tous les deux ans dans une
ville des Vosges. Départ en bruyant cortège
entre deux rangs de drapeaux tricolores
jusqu'à la gare pour le train de 16 h 30
vers l'Alsace allemande. Mais le groupe régional
d'Épinal fort de 40 membres, parrainé
par Mulhouse et Belfort, n'est
officiellement fondé qu'en février 1908
en présence du président STORCK et du
secrétaire BRUGGEMANN. MATHEY qui en 1897
avait lancé l'idée de rassemblements régionaux
demande la réintégration dans
l'Association des membres qui avaient démissionné
à la suite du premier refus.
La vie du groupe continue avec des
réunions, conférences, visites d'usines,
excursions, etc... témoignant d'un grand
dynamisme. Toutefois, la guerre disperse
les membres et les rencontres se font plus
rares jusqu'en décembre 1915, où un
nouvel élan est donné pour se substituer
aux Mulhousiens qui semblent écrasés
sous la chape de plomb germanique. Nous
avons parlé ailleurs de l'initiative des
Spinaliens de lancer une édition
provisoire d'un "Bulletin N° 1 de
l'Association des Anciens Élèves de l'École
de Filature et Tissage de Mulhouse".
Ce groupe remuant participe régulièrement
aux Assemblées à Mulhouse jusque dans
les années 1980.
Les Lions de Belfort en 1907
Comme souhaité, une réunion de 60
Anciens venus de Belfort, d'Alsace (avec
le président STORCK et le secrétaire
BRUGGEMANN), d'Épinal, de Paris, d'Italie
et même de Lodz a lieu les 21 et 22
septembre 1907 à Belfort. Les Alsaciens
sont à pied d’œuvre samedi matin à 8
h pour visiter la S.A.C.M.. Dans les
ateliers qui occupent 3.500 personnes
(l'ensemble des usines S.A.C.M. de
Mulhouse, Belfort et Grafenstaden compte
à cette époque plus de 10.000 salariés),
on construit des peigneuses et autres
machines textiles, mais aussi des moteurs
et turbines à vapeur, des dynamos et
moteurs électriques, des turbines
hydrauliques et des locomotives. Nos
Anciens visitent également les Filature
et Tissage Gustave DOLLFUS (dirigé par
son fils Daniel), la corderie mécanique
STEIN, le Tissage de coton Max DOLLFUS à
Héricourt, la Filature de laine SCHWARTZ
à Valdoie. On déjeune et dîne chez
DANJEAN et, dimanche matin, on grimpe
jusqu'au Lion, aux Forts de la justice et
de la Miotte. Réunion constitutive du
groupe régional de Belfort et décision
d'élaborer un Règlement Intérieur pour
la fondation de groupes régionaux si un
nombre suffisant de 30 Anciens est réuni,
par exemple à Épinal, Paris, Milan,
voire Moscou, une espèce de Fédération
internationale dirigée par Mulhouse. Un
comité régional composé de 6 membres
est formé, dont un président qui dirige
le groupe et un secrétaire qui envoie les
comptes rendus de chaque manifestation au
Comité central à Mulhouse. Le groupe régional
de Belfort sous la présidence de Léon
FLAMAND est officiellement créé en
octobre 1907 et le secrétariat de
Mulhouse l'annonce à la Chambre de
Commerce et d'Industrie de Belfort.
Le président STORCK accompagné de
BRUGGEMANN participe également à une
Assemblée des Belfortains qui se tient en
octobre 1909 à Giromagny, suivie d'une
excursion en montagne. On se plaint du peu
de succès du service de placement des
Belfortains, en dépit des circulaires
envoyées aux industriels du secteur et
aux Chambres de Commerce de Lille, Lyon,
Roanne et Roubaix.
En octobre de l'année suivante, de
nombreux Mulhousiens avec STORCK et
BRUGGEMANN et quelques Spinaliens
assistent à l'Assemblée à Belfort présidée
par FLAMAND. Promenade dans la vieille
ville, réunion et banquet à l'Hôtel
JEANNIN, un tour à la Grande Taverne,
discussion sur l'organisation d'un Bal du
Textile à Belfort en janvier 1911 auquel
les Mulhousiens sont invités, et retour
à la gare. La tenue de ce Bal rencontre
un scepticisme de la part des industriels
belfortains qui veulent bien y participer
si les Mulhousiens y viennent également.
Mais le Comité de l'Association de
Mulhouse "doute fort que les
industriels, directeurs et employés
veulent se rencontrer à l'occasion d'un
bal, encore moins avec les dames. Comme
peu de temps auparavant a lieu le Bal du
Coton à Mulhouse, ils n'entreprendront
pas un voyage à Belfort à cet
effet".
L’idée de "section française"
fait son chemin en dépit des coups de
frein des Mulhousiens. A l'Assemblée générale
du groupe des Belfortains en octobre 1911
au restaurant WAGNER à Belfort, on suggère
une rencontre à Paris de tous les groupes
de France.

Les tièdes Nordistes
A l'occasion de l'Exposition
Internationale de Paris au printemps 1900,
DANZER suggère de convoquer une réunion
des Anciens de Mulhouse à Paris.
Toutefois, l'idée ne se concrétise pas
et le groupe ne se formera que plus tard.
Mais à la Pentecôte 1911, des Parisiens
se rencontrent à Lille avec les Anciens
du Nord et de Belgique pour former le
troisième groupe régional sous la
houlette de Eugène JUILLIOT en présence
du seul représentant du Comité central
BRUGGEMANN. Ce dernier avait envoyé des
invitations à tous les Anciens des
secteurs concernés. Apéritif à la
terrasse du Café JEAN et banquet à l'Hôtel
BAILLEUL à Lille. Discours de JUILLOT sur
la nécessité de créer ce groupement
face à d'autres groupes puissants
d'anciens élèves de l'École Centrale, de
l'École des Arts et Métiers à Lille, de
l'Institut Industriel du Nord, etc... Après
midi, avec le tramway par le Nouveau
Boulevard, visite de la Foire textile de
Roubaix où de nombreux constructeurs
alsaciens exposent. Certains profitent
d'un baptême de l'air avec des
"machines à voler"(sic). L'année
suivante l'Assemblée du groupe de Lille a
lieu en octobre au restaurant Rocher de
Concale non loin du Café JEAN. Les
rencontres se tiennent régulièrement,
sauf pendant la guerre, jusqu'en 1927 et
reprennent entre 1934 et 1937, puis, avec
plus ou moins d'ardeur de 1947 à 1971.
Les Parisiens batailleurs
En 1913, De MOOR constitue à Paris
même un groupe régional autonome. Un de
ses animateurs, DENIS, bouillonnante
personnalité, représente en mars 1918 l'École de Mulhouse au Congrès du Génie
Civil à Paris et voudrait "faire de
notre École une espèce d'École Centrale
du Textile pour atteindre le sommet de
l'instruction textile en France".
DENIS a aussi élaboré des nouveaux
statuts de l'Association qui font en 1919
l'objet de discussions passionnelles au
Comité de Mulhouse. Ce groupe parisien se
rencontre régulièrement et envoie un
compte-rendu de chaque réunion au Comité
central. Le dynamisme agressif du groupe
de Paris à travers son président DENIS
met les Mulhousiens à rude épreuve et
souvent dans l'embarras, par exemple, au
sujet de la désignation de "supérieure"
que DENIS veut voir accorder à l'école
de Mulhouse, de la publicité faite en
1922 par l'École d'Épinal décernant le
titre d'ingénieur, de la fondation en
1924 d'une Fédération des associations
des anciens élèves des écoles textiles
de France, de l'installation en 1925 d'un
bureau central à Paris, des remarques
outrageantes proférées à l'adresse du
Président de l'Association et du Comité
de Mulhouse, de la formation d'un Comité
supérieur décapitant le Comité central
de Mulhouse, jusqu'à la démission
collective du comité de Paris au
printemps 1926. Mais le groupe se réorganise,
se réunit régulièrement, envoie entre
les deux guerres et à partir de 1946
jusque vers les années 1980 presque
chaque année un délégué pour
participer aux Assemblées à Mulhouse,
accueille des Alsaciens de passage à
Paris, bref, vit la convivialité telle
qu'elle est prévue par le règlement des
groupes régionaux.
34. Les publications de
l’association
Déjà un an après sa fondation,
le Comité de l'Association décide, en février
1898, de créer un bulletin. D'ailleurs
l'article 18 des statuts de 1896 précise
que "tout membre peut soumettre à
l'association un travail concernant la
filature, le tissage ou les industries y
attenant. Le Comité le fera imprimer aux
frais de l'association s'il en reconnaît
l'utilité. Chaque membre en recevra un
exemplaire". Le but du bulletin est
plus large, "donner l'occasion aux
membres de publier les résultats de leurs
expériences et d'en faire profiter leurs
camarades, de renseigner sur les membres
et sur la marche de l'association en vue
de constituer un lien fraternel".
Des Anciens peu participatifs et un
gouffre financier
Ce "bulletin" se présente,
en fonction de l'évolution des événements
et des besoins, sous différentes formes.
1) Les "Nouvelles de l’Association
de l'Année... Association libre des
Anciens Élèves de l'École de Filature et
de Tissage de Mulhouse Alsace"
sont éditées à partir de 1898 régulièrement
ou occasionnellement, en langue française
et en langue allemande (Annexe N° 41 et
42). En effet, l'article 29 des statuts prévoit
"qu'il sera remis annuellement à
chaque membre un bulletin contenant la
liste actuelle des membres". Cette
publication comprend les listes des
membres du Comité, des membres
honoraires, des membres du Comité des
groupes régionaux, une liste alphabétique
de tous les membres, le rapport de
l'assemblée générale, les nécrologies
(souvent une page entière par personne),
les statuts et réglement intérieur, le
rapport sur l'année scolaire établi par
la Direction de l'école, des notices et
correspondances, des appels de
cotisations, d'adhésion à l'association
et de collaboration au bulletin, des
tarifs des annonces, des comptes rendus
des groupes régionaux, des distinctions
honorifiques, une liste des anciens élèves
dont l'adresse est inconnue, etc…,
enfin, une bonne vingtaine de pages
publicitaires. Brochure de 44 à 60 pages,
format 19 x 28 xm, imprimerie BRINKMANN à
Mulhouse. (cf. plusieurs pages de publicité
de constructeurs textiles des années 1905
annexées à la fin de l'ouvrage).
2) "Bulletin de l
Association Libre des Anciens Elèves de
l'École de Filature et de Tissage Mulhouse
Alsace" est édité pendant de
nombreuses années à partir de 1898, en
allemand et en français (Annexe N°
43).
Il comprend des articles techniques sur
des problèmes de l'industrie textile et
connexes illustrés par de nombreux
dessins, schémas et photos et une
vingtaine de pages publicitaires. Le rédacteur
responsable de 1899 à 1914 est Henri
BRUGGEMANN, auteur de plusieurs livres
dont il diffuse des prospectus avec le
bulletin. A partir de 1900, pour des
raisons d'économie (ou d'arrière-pensées
politiques?) on décide de n'envoyer aux
Alsaciens qui ont suivi les cours de l'école
en langue allemande que l'exemplaire en
langue allemande. Souvent les articles
sont rédigés par des anciens élèves de
l'École. Brochure de 60 à 100 pages,
format 19 x 28 cm, imprimerie BRINKMANN à
Mulhouse.
3) "Bulletin de l’Association
des Anciens Élèves de L’École de
Filature et de Tissage de Mulhouse"
Premier Numéro de la nouvelle série française,
édition provisoire bimestrielle de 16
pages, publiée à partir de décembre
1915 par un groupe d'Anciens d'Épinal,
format 15 x 23 cm, imprimée chez KLEIN à
Épinal (Annexe N°
44). Le gérant est le
président du groupe des Anciens d'Épinal
Léon FLAMAND et le rédacteur provisoire
le lieutenant Henri BONDOIT. Dans ce
premier Numéro - nous sommes en pleine
guerre - on relève : "Notre devoir
est d'affirmer notre vitalité"... A
noter que le mot "libre" n'est
pas repris dans le titre que l'Association
s'était donnée en 1896 à Mulhouse, car
en France on est libre, on n'a donc pas
besoin de le souligner. Le service de ce
bulletin est fait gracieusement à tous
les membres de l'Association, Français et
neutres . ...
"A nos camarades : Dès la
première ligne de ce bulletin, notre pensée
va vers ceux qui, en libérant le sol de
la Patrie, nous rendront entière notre
vieille École !... Le premier devoir que
les `Mulhousiens' auront à cœur de
remplir sera de tendre une main
fraternelle à ceux que l'effroyable lutte
aura terrassés et dans l'accomplissement
de ce geste de reconnaissance, nous ferons
l'union féconde..." Dans le Livre
d'or de l'Association pendant la guerre
figurent les morts au champ d'honneur, les
blessés et les citations. Malgré la
guerre, ce bulletin paraît avec une bonne
régularité.
4) "La Revue de la Filature
et du Tissage, Bulletin Technique de
l'Association des Anciens Elèves de l École
de Filature et de Tissage de
Mulhouse" est le titre que prend
le bulletin à partir de mars 1917, avec
quelque 400 pages annuelles (Annexe N° 45
et 46). En 1919, cette revue est reprise
par le Comité central de Mulhouse qui le
confie à la direction d'un rédacteur-gérant.
On y trouve de nombreuses rubriques :
liste des membres du Comité central et de
ceux des groupes régionaux, plusieurs
articles techniques avec dessins, photos
et graphiques, service des consultations
commerciales ; à partir de 1928 on ajoute
une rubrique bonneterie, liste des
brevets, question de droit commercial et
fiscal, partie commerciale, rapport du
Directeur de l'École sur l'année
scolaire, nouvelles de l'Association avec
séances du Comité central, réunions
amicales mensuelles à Mulhouse et
ailleurs, service de placement, petites
annonces personnelles, nécrologies et, à
l'occasion, une liste des anciens élèves.
En outre, à partir de 1920, le Comité crée
un service de "consultations
techniques" qui répond, par l'intermédiaire
de la revue, à la dizaine de questions
techniques posées par les lecteurs ;
toutefois vers 1930, ce service
s'essouffle et ne fonctionne pratiquement
plus, même si, en 1935, certains
souhaitent le voir repris. Entre 1919 et
1939, la revue de 11 numéros annuels
connaît un épanouissement extraordinaire
en atteignant au cours de ces 20 ans
quelque 50.000 pages imprimées dont pas
loin de 30.000 pages rédactionnelles. Une
performance !
5) Entre 1939 et 1947, par suite de
la guerre, aucune publication imprimée ne
paraît. En février 1946, le Comité
tente de reprendre contact avec les
Anciens en envoyant à ceux dont il a
l'adresse le premier Numéro des "Nouvelles
de l'Association des Anciens Elèves de l'E.S.F.T.B.M."
sous forme d'une dizaine de feuilles ronéotypées
agrafées, format 21 x 27 cm (Annexe N°
47). Plusieurs "Nouvelles" sont
ainsi diffusées en attendant de relancer
l'édition d'une revue.
6) Avec un nouveau titre, les
"Annales Textiles"
paraissent de 1948 à 1972, d'abord en
tant que "Bulletin trimestriel de
l'Association des Anciens Elèves de l'École Supérieure de Filature, Tissage
et Bonneterie de Mulhouse" et à
partir de 1967 "de l'École Supérieure
des Industries Textiles de Mulhouse"
(Annexe N° 48 et
49). Elles comportent
quelques articles techniques originaux ou
repris ailleurs et des nouvelles de
l'Association. Brochure de 40 à 100 pages
dont une vingtaine de publicité. Format
21 x 27 cm. Impression Imprimerie de
L'ALSACE.
7) Un "Bulletin
d'Information des Membres"
(B.I.M.), organe de liaison entre les
Anciens, devait paraître
trimestriellement à partir de début 1973
sous la responsabilité d'un jeune membre
du Comité (Annexe N°
50). Il est édité
deux fois par an en ronéotypé de 1974 à
1977, puis à partir de 1978 avec
couverture imprimée et textes photocopiés.
Il comprend des comptes rendus de
l'Assemblée générale annuelle, des
informations sur l'École et sur les
enseignements, des nouvelles de
l'Association et des groupes régionaux,
des informations pratiques, un ou deux
articles techniques (habituellement publiés
par des anciens élèves dans d'autres
revues), etc… ; signe des temps, le
service de placement publie in extenso les
offres d'emploi dans chaque numéro.
Brochure de 15 à 30 pages, format 21 x
29,7 cm,
8) Un "Annuaire des anciens
élèves" de l'école est la
suite logique de la "liste des
membres" diffusée dans le
"Bulletin" de 1898 et la
"Revue" de 1917 à 1939. Il est
édité de temps à autre à partir de
1947 en petit format de 12 x 17,5 cm avec
une cinquantaine de pages, puis publié en
annexe aux Annales Textiles en 1957 avec
261 noms. En 1973, l'Institut Textile de
France a contacté l'Association pour l'édition
d'un annuaire commun à toutes les Écoles
Textiles. Mais on préfère d'abord sortir
celui de l'Association, ce qui est enfin réalisé
régulièrement à partir de 1974. Il paraît
alors annuellement en format 15 x 21 cm
avec 100 à 150 pages (avec 54 annonceurs
en 1976, 45 en 1986 et 27 en 1996) et
comprend un bref historique de l'école,
la liste nominative alphabétique des
membres actifs de l'association avec
adresse, promotion et fonction, une liste
par région et établissement, une liste
par promotion et une liste des membres
retraités (Annexe N°
51). Rédaction et
mise à jour par le secrétariat du Bureau
de l'Association.
Des hommes s'engagent
Si l'édition de ces publications a
été la fierté et la manifestation
publique de l'Association, elle représentait
aussi, de tout temps, une préoccupation
constante pour ne pas dire obsessionnelle
et parfois insurmontable pour ses
responsables. C'est une longue et
lancinante litanie de soucis : le coût,
la publicité, un local adapté, le
contenu technique, les délais - des
membres démissionnent parce que la revue
sort en retard ! - etc… Trouver des
annonceurs pour couvrir les frais
d'impression, dénicher de rares auteurs
parmi les anciens élèves qui veuillent
bien écrire des articles techniques sur
leurs expériences professionnelles, écrire
dans les deux langues, indispensable entre
1900 et 1914, et faire exécuter des
dessins et des graphiques compréhensibles,
contrôler la qualité des écrits par un
comité de lecture, dégoter l'imprimeur
assurant la meilleure qualité au meilleur
coût, n'est pas une mince affaire. Ainsi,
à l'instar des "Nouvelles de
l'Association", ce premier bulletin
est réalisé à partir de 1899 par le
secrétaire-trésorier de l'Association,
professeur de filature et sous-directeur
Henri BRUGGEMANN. Le premier bureau de
l'Association et de la Revue fut installé
pour 10 ans dans une pièce du logement de
son directeur-rédacteur BRUGGEMANN, pour
laquelle il demande 2 Mark par an de
location. En 1900 le Comité trouve exagérées
les dépenses pour les traductions et les
dessins pour la revue. Par la suite et en
vue d'un meilleur contrôle des coûts, le
Comité procède, dès 1901, à la séparation
des comptes de la revue de ceux de
l'Association. En 1903, les frais de la
revue se montent à 2.120 Mark alors que
les ressources de cotisations ne représentent
que 2.664 Mark. En 1905, les dépenses se
montent à 4.250 Mark. A la suite de la
non-parution de la revue en 1911, on relève
avec satisfaction que les biens de
l'Association avaient augmenté de 3.300
Mark en un an. Les difficultés de
publication de la revue subsistent
longtemps encore : manque de moyens
financiers et trop faible participation
intellectuelle des Anciens.
Pour surmonter ces embarras, on
essaye à plusieurs reprises de collaborer
avec des revues textiles de notoriété
nationale. Déja en 1901, des pourparlers
avec le propriétaire et rédacteur en
chef de la Leipziger Monatsschrift für
Textilindustrie échouent, de même en
1903 avec l'éditeur de Textil und Färbereizeitung
à Braunschweig. A l'inverse, en 1907 l'éditeur
italien BIVIS de Milan propose d'acheter
nos articles avec mise à disposition des
clichés, à 0,15 F la ligne, pour
publication dans sa revue italienne "Industria
Tessile". En 1909, BRUGGEMANN assure
la rédaction technique d'une nouvelle
revue textile alsacienne hebdomadaire en
langue allemande "Elsässisches
Textilblatt" (Annexe N°
52) éditée
par J. DREYFUSS à Guebwiller (format 33 x
25 cm), dans laquelle est publié le
"Bulletin de l'Association Libre des
Anciens élèves de l'École de Filature et
de Tissage de Mulhouse". D'ailleurs
BRUGGEMANN, professeur depuis 1889 et
sous-directeur depuis 1898, quitte l'École
en 1913 pour se consacrer entièrement à
la publication et à son cabinet
d'expertise textile installé rue du
Sauvage N° 76 à Mulhouse. Le même éditeur
guebwillerois DREYFUSS publie à partir de
1912 la même revue en langue française
appelée "L'Avenir Textile" à
laquelle tous les Anciens s'abonnent. Après
la guerre, notre Association n'ayant pas
voulu reconduire son contrat de
collaboration avec cette publication, cet
éditeur s'adressait aux Anciens d'Épinal
qui encartèrent leur revue dans l'Avenir
Textile (Annexe N°
53). La même année,
des pourparlers sont également entamés
avec la revue mensuelle parisienne
"L'Industrie Textile", format 31
x 24 cm créée en 1884, mais ils échouent
à cause des conditions financières désastreuses
(Annexe N°
54).
Toutefois le plus gros souci a
toujours été de trouver des articles inédits.
Leur absence provoque des interruptions de
parution. Les idées géniales et les
belles déclarations au cours des réunions
ne manquèrent pas, mais leurs concrétisations
n'en sont pas moins décevantes. Dès 1904
on essaye de payer des honoraires aux
auteurs, mais il faut vite déchanter par
manque de moyens et parce que la récolte
d'articles ne s'en trouve pas améliorée.
En 1908, on propose d'instituer des
concours sur des questions techniques en
attribuant des médailles, sans plus de
succès. La suppression de la revue est
envisagée en 1910 à cause des frais trop
élevés et du manque d' articles
publiables. Enfin en 1914, la guerre met
fin à tous ces tracas...
Vers un périodique d'audience
internationale
A partir de 1919 et jusqu'en 1939,
la revue bimestrielle fondée en 1915 par
les Spinaliens est reprise par le Comité
central de Mulhouse. Le président de
l'Association en confie la responsabilité
à un membre de son Comité qui s'en dégage
déjà au bout de trois mois. C'est
ensuite le secrétaire Robert DUBOIS qui
s'en charge en demandant au Comité de
lecture de se réunir chaque mois. On élabore
de nouveaux principes de fonctionnement de
la revue et de sa comptabilité distincte
de celle de l'Association.
En 1920 le rédacteur DUBOIS
s'occupe de la revue en abandonnant le
poste de secrétaire de l'Association.
Finalement, un an plus tard, DUBOIS, élu
entre-temps président de l'Association, démissionne
de son poste professionnel de directeur de
filature pour raison de santé et se
consacre à plein temps à la revue en
tant que gérant. Après son décès prématuré,
un autre Ancien travaille pour la revue
pendant quelques mois jusqu'à l'automne
1925 où Julien FROEHLIGER (promo 1905/06)
est embauché comme gérant. II porte à
bout de bras "sa" revue et lui
donne ses lettres de noblesse, diffusant
dans le monde entier le message de l'École. Mais les problèmes financiers
deviennent de plus en plus inextricables.
Avec l'apparition de la crise textile en
1929, de nombreux annonceurs résilient
leurs contrats, les ressources diminuent
et le compte de la revue laisse des bénéfices
de plus en plus maigres à l'Association.
En 1932, une trentaine d'entreprises
abandonnent les annonces. Les comptes de
la revue allouent pour 1931 au gérant
20.000 F, à la dactylo 1000 F et à
l'Association 9.620F, en 1934
respectivement 15.000, 300 et 2.780 F, en
1936 resp. 2.386, 300 et 0 F et en 1938,
pour la première fois depuis 1925, les
comptes accusent un solde négatif. Au 1er
septembre 1939, avec la guerre, la revue
est suspendue. Julien FROEHLIGER démissionne
début 1941 et remet les archives et le
mobilier de son bureau à l'Association.
Il décède prématurément en 1943.
Faiblesse des moyens et évolution des besoins
Dès début 1946, le Comité
reprend le projet de l'édition de la
revue technique. Le périodique parisien
"L'Industrie Textile" qu'on
avait recontacté, propose de faire paraître
notre revue encartée dans la sienne comme
bulletin spécial. Mais le Comité trouve
que notre bulletin, réalisé par nous
mais encarté dans une autre revue,
perdrait sa personnalité et son prestige.
Mi 1947, le Comité décide de confier à
Jacques WIERNSBERGER (promo 1919) et le
secrétariat et la gérance de notre
nouvelle revue qui s'appellera
"Annales Textiles" et paraîtra
trimestriellement. Des démarches auprès
des annonceurs (69 entreprises
potentielles), des difficultés
juridiques, administratives et
d'attribution de papier retardent encore
sa sortie. Enfin, début 1948, le premier
numéro est mis sous presse chez BRINKMANN
pour un coût de 85.000 E Un numéro coûtera
400 F par membre et par an. En juin 1949,
Jacques WIERNSBERGER part pour raisons
professionnelles à Thaon mais continue à
s'occuper de la revue. Il lance un appel
pressant à tous les Anciens de collaborer
à ce travail par des articles originaux,
car "diffuser du réchauffé ne présente
pas d'intérêt" souligne le
Directeur de l'École. Mais c'est un cri
dans le désert ! Bien que nous soyons une
des rares Associations à éditer un
bulletin technique parfois demandé par
des éditeurs d'Angleterre et d'Amérique,
nos efforts sont insuffisants. Avec
l'inflation galopante, il faudrait en
1952, pour couvrir les frais d'impression,
un MF de recettes. A cet effet, on
augmente le tarif d'annonce à 30.000 F la
page et les cotisations de 500 à 750F. En
1955, l'industrie textile marchant au
ralenti, le bulletin est maintenu en
veilleuse, malgré les promesses d'Anciens
du groupe Nord de remettre des condensés
d'articles techniques intéressants de la
presse technique française et étrangère.
En conséquence, la revue peu étoffée
lui fait perdre les annonceurs. A partir
de 1956 le rédacteur est secondé par une
secrétaire, Madame REINBOLD (veuve de
Robert REINBOLD promo 1925, décédé en
1955). L’année suivante, le coût
annuel de 900 exemplaires s'élève à
540.000 E. En 1961 WIERNSBERGER se plaint
"de moins en moins de substance pour
de plus en plus de publicité". Petit
à petit, les préoccupations concernant
le développement du statut de l'école et
le développement rapide de l'adaptation
de l'enseignement aux besoins de
l'industrie et de la recherche prennent le
pas sur le souci de diffuser une revue. Un
périodique textile technique particulier
ne répondant plus aux besoins du marché,
le manque de moyens financiers et de
collaboration intellectuelle devenant trop
pesant, les "Annales Textiles"
se meurent en 1972. Aucun avis de décès
au cours d'une Assemblée Générale ...
L’année suivante, le "Bulletin
d'Information des Membres", réalisé
par le secrétariat de l'Association, est
lancé. Mais ce n'est plus une revue
technique originale. Les travaux du bureau
de placement et les informations sur l'École et l'Association deviennent
prioritaires. Après le départ de Madame
REINBOLD à la retraite fin 1975, c'est
Madame Alice GEORGER (épouse de Hubert
GEORGER, promo 1947) qui prend la relève
début 1976. Depuis, le B.I.M. est publié
régulièrement.
*
*
*
Si notre Association fête ses cent
ans d'existence, ses statuts ont presque
130 ans d'âge. Bien sûr, cette suite
d'articles définissant les buts de
l'Association et réglant son
fonctionnement a subi l'outrage du temps
et a dû s'adapter aux nouveaux besoins.
Elle a dû supporter de nombreuses
attaques, dont les plus virulentes
exigeaient sa disparition ou son
changement complet. Finalement, le tronc
commun de nos statuts est resté inébranlé
et les Mulhousiens, parfois considérés
comme des provinciaux attardés, ont su
maintenir le cap contre toutes les
tendances centrifuges et les menaces de
scission.
L'Association apporte grandement
son soutien et son analyse critique et
constructive à l'École. Par ses activités
de publications et de visites
d'entreprises et d'institutions, elle
s'insère dans la vie de la Cité et complète
la connaissance du milieu socioéconomique
et culturel de notre région.
L’Association, grâce à la
convivialité qu'elle favorise, notamment
au cours des rencontres annuelles, développe
les relations humaines et permet
occasionnellement à tous les Anciens
d'effectuer leur "petite régression"
pour partager des souvenirs de jeunesse.
La gaieté et la joie des retrouvailles
d'Anciens des "bons vieux temps"
donnent l'impression que, malgré les
tribulations des époques hautement
perturbées d'autrefois, nos pères
textiliens savaient s'amuser, comme dit la
vieille chanson vinique,... "bien
autrement que nous, morbleu ! bien
autrement que nous !"
En dépit de 150 ans de crise de l'industrie
textile, avec le moral d'acier des anciens
élèves, avec la faculté d'adaptation
des responsables de l'École, notre vieille
École peut envisager l'avenir avec sérénité. Sources
archivistiques

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